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Citation de Aelle


Aelle
22 novembre 2023
Il se trouve que, n'ayant pas été aveuglé par ma propre progéniture, j'ai toujours eu le sentiment que parmi les enfants d'aujourd'hui se cachait aussi les connards de demain. L’idée que nos enfants feraient mieux que nous, apprendre à de nos erreurs, m'a toujours paru un peu folle. En tant qu’ancienne enfant, j'ai dû reproduire les erreurs de mes parents et de leurs parents avant eux pour arriver à me faire une vague idée de ce à quoi pouvait et devait ressembler à une vie. Les erreurs ont été commises sous d'autres formes, avec d'autres moyens d'expression, d'autres conséquences. Mais aucun parent n'a pu empêcher son enfant de tester les limites de son propre corps et de son existence. Aucun parent ne peut empêcher un enfant d'être ce qu'il est. Il n'est pas question ici de minimiser l'impact de l'éducation, de l'amour ou de la négligence, de la transmission ou de l'abandon dans le devenir d'un enfant. Mais les personnes atroces d'aujourd'hui ont aussi été des enfants qui ont fait leurs premiers pas sous les applaudissements de leur famille, qui ont aimé lécher le chocolat dans la casserole, qui ont ri aux larmes devant un père qui faisait semblant de conduire sans les mains. Il est question au contraire d'envisager que l'enfant ne soit pas forcément le visage de l'espoir. Et s'il ne s'arrête pas à la gêne que peut provoquer une telle pensée, alors on peut continuer à se retrousser les manches plutôt qu’à déléguer la concrétisation de nos idéaux à la génération que nous créons.
Le problème de voir dans les enfants le visage du progrès et de la civilisation qui vient, c'est que cela peut nous pousser à abandonner nos propres velléités d'action, à rentrer dans une forme d'apathie intellectuelle ou à ne plus nous préoccuper que de ce qui est susceptible de concerner le bien-être des enfants. Ils se mettent à grandir, nous commençons à vieillir. Nous sommes habitués à un certain confort de vie. Nous sommes fatigués d'avoir essayé et d'avoir parfois échoué. Nous sommes plus lucides, plus pragmatiques, plus désabusés. C’est le moment où l'on est tenté de passer le relais à la génération d'après. Mais est-ce bien raisonnable de leur léguer la responsabilité de faire mieux que nous et de nous désengager de notre époque, au prétexte que les plus jeunes sont plus innocents, plus déterminés, plus radicaux (oubliant au passage qu'il y a aussi des enfants et des adolescents conservateurs qui se foutent complètement de l'avenir du monde). Ce n'est pas raisonnable de notre part et ce n'est pas gentil non plus. Mais, pour ne pas faire payer ce lourd tribu aux enfants, il faut accepter de renoncer au confort de les envisager tous et toutes comme des miracles ( et de continuer à défendre des principes qui ne bénéficieront pas qu'à la chair de notre chair).
page 195
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