La vie est un parcours, un concours de circonstances. Certains disent « C’est ma destinée, nous avons tous un chemin tracé ».
Si nous n’avions pas rencontré cette personne, si nous n’avions pas eu cette maladie, nous n’aurions pas eu toutes ces difficultés. On pense alors que, lorsque tout va mal, on a fait des erreurs de choix, d’éducation ou dans nos relations. Mais, est-ce bien là le réel problème ?
Julien sort enfin de la maison, encadré par plusieurs hommes. Ses poignets ne sont pas attachés ; il n'a commis aucun délit, sauf celui d'être malade. Il est la victime de ces innommables démons, ses agresseurs.
Le jeune homme passe devant Carole et lui dit avant de s'asseoir dans l'ambulance :
— Pourquoi tu as fait ça ?
Elle ne dit rien. Son cœur est serré. Elle n'avait pas le choix.
L'immense amour que cette maman a pour son fils se transforme en désespoir. Carole sait que Julien lui en voudra toute sa vie.
Il avait vingt-huit ans
Le regard océan
Sensible et souriant
Je l’aimais tant
Dire adieu à son enfant
Insoutenable pour une maman
En milieu spécialisé
Croisant drames et dangers
Il est mort en pleine santé
D’une erreur médicalisée
L’avenir est devenu procès
Des institutions sont visées
Blondinet trop agité
Adolescent torturé
Âme tourmentée
Dans le rap il s’est jeté
Chemin tout tracé
La presse s’en est mêlée
Mal dans sa vie
Incompris
Sans suivi
Il défie, supplie
Et multiplie les délits
Effroyable tsunami
Drogué,
Interné,
Emprisonné
Relaxé mais interloqué
Il recherche la sérénité
Dans un monde sans liberté
Je suis venu vous épater,
J’ai décidé de sortir un CD
Pour les bras cassés,
Les gros casiers
J’ai le meilleur rap du marché
T’en as pas idée avec un stylo stylé
C’est dans l’au-delà désormais
Qu’il compose en paix
Voguant à l’infini
Sur des notes fleuries
Ange étoilé,
Mon fils, mon chéri
Julien contacte alors des personnes pour organiser la mise à mort de cette femme. Il envoie des dizaines de messages. Il va payer quelqu'un pour la faire taire.
Il est totalement en dehors de toute réalité, sa tête explose. Il est au bord du précipice et peut basculer en un instant.
Carole, impuissante, écoute son fils délirer et essaie de le calmer, en vain. Que peut-elle faire ? Appeler une fois de plus l'institution et la police pour l'emmener de force comme la première fois ?
Elle a peut de son enfant, ce fils qu'elle aime tant et dont des monstres ont totalement pris possession de son esprit.
C'est le cœur à l envers que le lecteur en ressort
Citation de Florence Tassoni auteure
Des larmes de douleur coulent sur les joues d'Édith. Son regard est vide. Elle reste dans un mutisme de longues minutes avant de comprendre que c'est fini.
Ils sont et seront toujours fusionnels. Quand l'un souffre, l'autre souffre aussi. Carole l'a compris depuis longtemps. Même à distance, elle ressent cette inexplicable sensation. L'amour est si intense entre cette maman et son fils.
Comment accepter que certains naissent avec toutes les chances d’être heureux et d’autres avec tant de souffrances ? Une question à laquelle personne ne peut répondre. Est-ce une question d’argent, de santé ou de chance ?
La vie est un parcours, un concours de circonstances. Certains disent « c’est ma destinée, nous avons tous un chemin tracé ».
Si nous n’avions pas rencontré cette personne, si nous n’avions pas eu cette maladie, nous n’aurions pas eu toutes ces difficultés. On pense alors que, lorsque tout va mal, on a fait des erreurs de choix, d’éducation ou dans nos relations. Mais, est-ce bien là le réel problème ?
– C’est quoi être gentil maman… ?
À force d’insister sur le fait que son fils a un problème, un juge accepte qu’une expertise psychiatrique soit faite. Elle est réalisée au sein même de la vieille maison d’arrêt.
Les conclusions du grand spécialiste resteront dans un dossier bien ficelé, à l’abri de tout regard pendant quelques temps, des années.
Certes, une première avancée, mais qui ne sert à rien sauf à faire preuve d’un peu de gratitude face à une maman qui crie son désarroi.
L’alcool et la violence psychologique sont de plus en plus présents au sein du foyer. Quelques assiettes volent comme des oiseaux aux ailes abîmées qui finissent leur parcours fracassées contre les murs. Cette petite antenne de télévision, pourtant si pratique pour capter les émissions dans ce froid pays, elle aussi voltige ; mais là, les murs ne sont pas abîmés, c’est son crâne meurtri, rougi par le sang, qui le sera.