Le visage de Noa s’illumine devant le décor étincelant. Trois sapins entourent un village miniature. Le courant d’air venant de l’entrée fait virevolter les guirlandes et les boules de Noël. L’une d’elles tombe au sol avec fracas. Mes yeux se dirigent vers le plafond voûté, où un lustre antique se balance un peu trop à mon goût, produisant un grincement alarmant.
— Il va tomber ? s’inquiète Noa.
— Non, c’est juste un très vieux bâtiment, c’est tout.
Mon frère me lance un regard inquiet. Je le rassure en murmurant à son oreille :
— Le père Noël visite les hôtels. Est-ce que je raconterais des mensonges ?
— Non, mais tu fais des secrets.
Je lui lance un sourire complice.
Dans le hall, une table basse a été aménagée pour rendre hommage à la famille disparue. Le cadre est entouré de lampions. Le cliché représente deux adultes et quatre enfants. La fille a effectivement une robe blanche semblable à la mienne. Elle tient par la main un garçon qui a l’âge de mon frère.
Je choisis un fauteuil un peu à l’écart. Je tente de me connecter au réseau pour effectuer une recherche sur l’incident impliquant cette famille.
Le Wi-Fi ne fonctionne pas mieux que dans notre chambre. J’ouvre finalement mon carnet
Je trébuche et mon calepin tombe en s’ouvrant sur mes croquis.
— Attention, ma belle. Il faut regarder devant toi, quand tu marches. Ce sont de beaux dessins.
— Merci. Je suis des cours.
— Les visages sont bien réussis. Ta chambre est sur cet étage ?
À cet instant, je me rappelle avoir vu une vidéo prodiguant des conseils de sécurité aux
voyageurs. Règle numéro un : ne jamais donner d’informations personnelles à un étranger.
Je réponds vaguement :
— Non, je visite de la famille.
— Sois prudente quand même.
Noa s’agrippe à ma taille alors que nous entrons dans l’ascenseur. Un grincement retentit dès que le mécanisme s’active. Le son sinistre nous accompagne jusqu’au douzième étage.
J’espère que la panne d’électricité ne se reproduira pas pendant que nous sommes dans la cabine...
L’idée du gouffre sous nos pieds me donne des sueurs froides.
Je me dépêche de filer vers l’ascenseur. La dernière recommandation de cet inconnu m’intrigue. Contre quoi me met-il en garde ? La blogueuse s’intéresse aussi à cet étage. Je n’aime pas l’idée qu’un évènement sinistre ait peut-être eu lieu si près de notre chambre.
.Devant nous se dresse une porte en bois massif. La devanture grise de l’Hôtel Saint-Nicolas est noircie par endroits. Ce bâtiment sombre ne donne pas l’impression de temps des Fêtes. Le petit sapin à l’entrée n’a presque plus d’épines.
Ma mère essaie plusieurs prises électriques avant d’en trouver une qui fonctionne.
Devant ma mine abattue, elle déclare :
— Alix, c’est un hôtel centenaire. C’est normal de perdre la connexion Wi-Fi de temps en temps.
Cet étage est le dernier endroit où ils ont été vus vivants. Tu ressembles à la fille qui pose sur la photo du rez-de-chaussée. Robe blanche. Cheveux blonds. Tu pourrais être son fantôme.
J’ai l’impression qu’un danger invisible me poursuit jusqu’au rez-de-chaussée. Je viens seulement d’arriver, mais j’ai déjà hâte de quitter cet hôtel inquiétant
Noa me serre très fort la main alors que nous franchissons le seuil.