AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de enzo92320


[ Jonas Salk ]

Peu de satisfactions sont aussi profondes que celle de savoir que l'on a apporté de telles améliorations au bien-être de l'humanité.

C'est à cette élite chanceuse qu'appartient Jonas Salk. Jeune étudiant en médecine, il a rejoint une équipe de recherche qui étudiait la tragique maladie de la poliomyélite à l'université de Pittsburgh. Jusqu'alors, la poliomyélite était une maladie qui ruinait la vie de dizaines de milliers d'enfants chaque année. Chaque été, lorsque les taux de la maladie atteignaient leur maximum, les mères redoutaient d'envoyer leurs enfants en colonie de vacances, au cinéma ou dans n'importe quel endroit où ils pourraient attraper la contagion.

Après avoir identifié différentes souches du virus en laboratoire, Salk a pu démontrer, d'abord chez le singe, puis chez l'homme, que l'injection de virus morts induisait la formation d'anticorps et permettait donc de prévenir la maladie. L'utilisation à grande échelle de ce que l'on a appelé le vaccin Salk a permis d'éradiquer presque complètement une maladie qui pesait sur la vie de tous les habitants des États-Unis.

Cette percée a fait de Salk une célébrité scientifique. Les fondations et les donateurs individuels rivalisent pour offrir un soutien financier à ses prochains projets. Mais Salk, tout en continuant à s'intéresser à la recherche en laboratoire, avait placé la barre encore plus haut : son objectif était désormais de comprendre l'immense voyage de l'évolution, des formes inorganiques à la vie biologique et, enfin, au domaine métabiologique des idées. Pour réaliser cette synthèse, il était nécessaire de réunir des personnes représentant toutes les branches du savoir humain ( ). Il a donc prévu d'utiliser son énorme prestige et son soutien financier pour créer un nouveau centre interdisciplinaire, un "creuset de créativité" où les scientifiques, les artistes et les penseurs de différentes obédiences se réuniraient pour stimuler l'esprit des uns et des autres. Il devait s'agir d'un espace d'une grande beauté physique qui recréerait pour notre époque l'éclat intellectuel du Weimar de Goethe, de la cour des Médicis, de l'académie platonicienne. En 1960, il s'est associé à l'architecte visionnaire Louis Kahn et, ensemble, ils ont construit les splendides structures de l'Institut Salk, qui se dresse comme un descendant contemporain des temples grecs antiques dans un bosquet au-dessus de l'océan Pacifique à La Jolla, dans le sud de la Californie. C'est dans ces bâtiments que le rêve de Salk de créer une centrale d'idées devait se réaliser.

Pourtant, l'histoire prouve amplement que même les bienfaiteurs de l'humanité ne sont pas à l'abri de l'entropie qui affecte les vies ordinaires. Pasteur a dû faire face à de vives critiques contre ses efforts pour utiliser le vaccin contre la rage ; Semmelweis a souffert d'une dépression mentale terminale lorsque tous ses collègues médecins se sont moqués de ses idées vraies mais trop avancées. Il n'est donc pas surprenant que la seconde carrière de Salk ait rencontré des obstacles inattendus. Afin d'établir les références scientifiques de l'institut, son fondateur commença par engager des biologistes traditionnels pour diriger ses laboratoires. Parce qu'il souhaitait que l'institution soit gérée selon des principes démocratiques, Salk a cédé la plupart des pouvoirs à ses jeunes collègues. Malheureusement, lorsque le moment est venu de commencer à transformer le laboratoire en centre de ses rêves, Salk découvre que les scientifiques traditionnels n'ont aucune sympathie pour sa vision novatrice. Ses collègues préfèrent consacrer toutes les ressources de l'institut à des recherches biologiques plus sûres et plus orthodoxes. L'idée de faire venir des astronomes et des physiciens, sans parler des musiciens et des philosophes, pour des discussions sérieuses, leur paraissait une simple complaisance. Le conflit qui s'ensuivit se déroula selon les principes de la mythologie classique : Le créateur est détrôné par sa progéniture. Salk conserva un bureau et un statut cérémoniel, mais ne put mettre en œuvre les idées qui avaient permis à l'institut de voir le jour.
Commenter  J’apprécie          00









{* *}