Je suis dans l’esprit d’un mort…
Je suis dans l’esprit d’un mort
dont je suis la dernière pensée,
et son va-tout
Ombre naïve…
Ombre naïve qui crut avoir un corps
parce qu’on la touchait.
Une absence…
Une absence fait résonner tout l’espace,
le vide,
par une fracture soudain que rien ne corrige,
aucune raison,
et dans laquelle
toute réalité s’engloutit.
Ne peut-on pas mourir de trop pleurer…
Ne peut-on pas mourir de trop pleurer,
comme une hémorragie de l’être ?
Tout semble si simple…
Tout semble si simple, si parfaitement naturel…
On voudrait briser ce soleil pour voir ce qu’il renferme,
tordre cette pluie, faire parler le silence des animaux…
C’est comme si nous étions les seuls à ne pas savoir le secret
quand tout vivrait dans son évidence.
Je voudrais seulement savoir…
Je voudrais seulement savoir où je dois mourir.
La solitude est cet exil de toute part.
Il faudrait être stylite…
Il faudrait être stylite,
mais où est la colonne ?
Je ne vois que les colonnes brisées
d’un temple en ruine
dans le désert.
Sans doute il faudrait être patiente…
Sans doute il faudrait être patiente,
mais je ne peux plus attendre.
C’est maintenant que le présent doit arriver.
Seul…
Seul,
tout devient
séparation.
Nous pleurons…
Nous pleurons
pour faire fondre la nuit.
Deux ombres…
Deux ombres échangent leur corps en silence.
Ce point de condensation…
Ce point de condensation intérieur
où l’on serait vraiment.
Et la cible…
Et la cible se planta dans son cœur.
L’espace ouvert en soi…
L’espace ouvert en soi
qui le refermera ?
Dieu nous donne de faux indices…
Dieu nous donne de faux indices
pour que nous ne retrouvions jamais sa trace.
Mais pour que nous entretenions ses chemins.
Le cœur me brûle…
Le cœur me brûle.
Je suis perdu comme chaque fois.
Quels sont ces fleuves croisés qui s’éveillent
et ont le pouvoir de faire s’accélérer l’être
et de le mettre à la torture dans cette confusion surnaturelle ?
La nudité, l’appel,
le corps qui cherche son unité à travers d’autres corps,
sa présence.
Le désir dans le crâne percé,
le sang qui cherche furieusement
à se brancher sur le nerf magique d’un destin
qui lui donnerait l’immortalité d’un sens.
Un baiser referme le monde dans sa nuit.
Un baiser plus profond que la tombe,
et le corps aimé n’est plus corps,
mais oubli, éternité.
Les corps s’aiment
parce qu’ils sont perdus,
pour se retrouver.
Nous avons tous un cœur
proche de se déchirer et prendre feu.
Un corps désiré ranime le goût blessé du vide…
Tomber dans un cri inconnu à travers le corps
qu’on sent à tel point qu’on ne le sent plus.
Le désir cherche à toucher,
mais le contact attendu
est celui de l’essence de la présence.
Aimer voudrait n’avoir pas de corps
pour aller au plus près.