Florence Mornet

Quant à mon caractère plutôt tolérant, je l’ai hérité de ma mère. «  Mettre de l’eau dans son vin pour apaiser les lendemains  » est sa réplique favorite, qu’elle se plaît à nous ressasser encore et toujours lorsque nous sommes, mon père ou moi, en colère. Eh bien Émilie est tout le contraire de cela, et c’est sans doute ce que j’aime le plus chez elle  : parler et agir sans réfléchir aux conséquences, s’affirmer et tenir tête aux gens, même quand elle a tort. Au début de notre relation, elle m’était ainsi apparue comme une battante, une femme pleine de vie qui s’assumait et se démarquait. Je dois reconnaître que je l’envie énormément pour ce côté-là de sa personnalité.

Je reste stoïque et continue d’observer mon amie d’enfance. Alors qu’elle était pétillante et pleine de vie il y a quelques instants, son regard semble maintenant plutôt inexpressif.
D’habitude, j’arrive facilement à lire les gens. Ne dit-on pas que le regard est le miroir de l’âme  ? Mais là, j’ai beau creuser, je ne parviens à déchiffrer aucun sentiment dans celui de Sarah et c’en est tout autant perturbant que frustrant.

C’est bien trop dur de devoir affronter la réalité, de voir que je fais du mal à la personne qui m’aime et que j’aime depuis toutes ces années.

L’ange qui passe nous enferme un instant dans une bulle. Je me sens léger, comme sur un nuage, comme si j’étais enveloppé d’une aura cotonneuse. Pourtant, malgré cet instant magique, je sais que je dois reprendre le fil de la conversation. Si ce silence se prolonge trop, elle risque de ressentir un malaise et de finir par partir.

Il faut dire qu’une relation basée sur le sexe n’apporte jamais grand-chose quand l’amour ne prend pas le relais. Enfin… ce que j’en sais, moi, de l’amour…