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Citation de Cannetille


La routine variait rarement et ce jour-là n’était pas différent des autres. Les hommes qui n’étaient pas en train de couper du bois allumèrent les feux sous les chaudières. Il y en avait quatre en tout, alignées en batterie. Lorsque la première était en ébullition, le jus de canne était transféré au moyen de cuillères dans la grande marmite suivante, et ainsi de suite jusqu’à ce que le sirop réduit fût arrivé jusqu’à Caleb, qui surveillait son déversement dans le tonneau. Lorsque celui-ci était plein, il fixait dessus un plateau, le déplaçait dans un coin pour le laisser refroidir et le remplaçait par un tonneau vide.
La chaleur s’accumulait irrésistiblement et ils toussaient sans arrêt, une toux pareille à de longs aboiements qui trahissait la pénibilité de leur labeur. À la fin de la journée, afin de délasser leurs corps après avoir touillé sans fin debout pendant des heures, ils se ruaient à la rivière et se laissaient flotter sans bouger dans ses eaux glacées.
Caleb se rappelait que pendant sa première semaine, un garçon pas plus vieux que lui avait par inadvertance lâché sa cuillère. Le sirop avait coulé comme de la lave, et ils avaient assisté à son supplice muet : ses yeux qui lui sortaient de la tête, ses poings qui se serraient comme des boules de douleur. Un spectacle si fascinant que personne n’avait bougé : la vue du sirop dégoulinant à l’intérieur de sa botte et la perspective d’avoir à l’enlever, alors que le cuir avait déjà adhéré à sa peau. Plus tard, le garçon leur avait décrit la douleur quand le médecin s’y était appliqué : comme si on lui avait arraché la langue. Caleb n’avait pas oublié. Il aurait été étonné qu’un seul d’entre eux eût oublié.
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