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Citation de Apoapo


7. « L'anxiété, l'addiction, et la dépression ne sont pas simplement des secrets à révéler ou des illusions à révoquer. Prêcher contre les horreurs de l'Empire peut alimenter le cynisme ou le détachement ironique plutôt que de défaire l'assujettissement. On peut se sentir contraint.e et diminué.e, et ce malgré notre conscience politique. Les sujet.te.s de l'Empire sont "libres" d'être défiant.e.s et d'avoir du ressentiment vis-à-vis du système dans lequel ils et elles vivent. On peut haïr l'Empire autant que l'on veut, tant que l'on continue de travailler, de payer son loyer et de consommer. Il n'y a pas de correspondance simple entre les intentions et les actions, comme si le problème c'était simplement de trouver quoi faire et de le faire. Défaire l'assujettissement ne revient pas à une forme d'opposition consciente ou à trouver une façon d'être joyeux.se au milieu de la misère. Contester le monopole radical de l'Empire sur la vie veut dire interrompre son emprise affective et infrastructurelle, défaire certains de nos attachements et de nos désirs, et en créer de nouveaux.
[…]
Voici ce qu'un.e participant.e anonyme au soulèvement du Caire, en Égypte, où les personnes ont pris la désormais célèbre place Tahrir, avait à en dire :
"Jamais La Caire n'a été aussi vivant que durant la première place Tahrir. Puisque plus rien ne fonctionnait, chacun prenait soin de ce qui l'entourait. Les gens se chargeaient des ordures, balayaient eux-mêmes le trottoir et parfois même le repeignaient, dessinaient des fresques sur les murs, se souciaient les uns des autres. Même la circulation était devenue miraculeusement fluide, depuis qu'il n'y avait plus d'agents de la circulation. Ce dont nous nous sommes soudain rendu compte, c'est que nous avions été expropriés des gestes les plus simples, ceux qui font que la ville est à nous et que nous lui appartenons. Place Tahrir, les gens arrivaient et spontanément se demandaient à quoi ils pouvaient aider, ils allaient à la cuisine, brancardaient les blessés, préparaient des banderoles, des boucliers, des lance-pierres, discutaient, inventaient des chansons. On s'est rendu compte que l'organisation étatique était en fait la désorganisation maximale, parce qu'elle reposait sur la négation de la faculté humaine de s'organiser. Place Tahrir, personne ne donnait d'ordre. Évidemment que si quelqu'un s'était mis en tête d'organiser tout cela, ce serait immédiatement devenu le chaos." » (pp. 149-152)
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