AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Coco574


Lorsque Liam Sullivan s’éteignit à l’âge de quatre-vingt-douze ans, dans son sommeil, au côté de celle qui avait partagé soixante-cinq ans de sa vie, le monde entier pleura la disparition d’une icône.
Cadet des sept enfants de Seamus et Ailish Sullivan, Liam était né dans une modeste ferme du village de Glendree, dans le comté de Clare, en Irlande. Il avait connu la faim, les années de disette, et n’avait jamais oublié le goût du pudding de sa mère, ni ses raclées, toujours méritées.
Il avait perdu un oncle ainsi que l’aîné de ses frères pendant la Première Guerre mondiale, et l’une de ses sœurs était morte en couches avant son dix-huitième anniversaire, en mettant son second enfant au monde.
Dès le plus jeune âge, il labourait les champs derrière un cheval répondant au nom de Moon, il tondait les moutons, égorgeait les agneaux, trayait les vaches et savait construire des murs de pierres sèches.
Toute sa vie, il garderait un souvenir ému des veillées familiales autour du feu de tourbe – la voix d’ange de sa mère, les airs de violon et le sourire amoureux de son père, les gigues endiablées de ses frères et sœurs.
Adolescent, il se faisait parfois quelques pennies en chantant au pub du village, pendant que les hommes éclusaient des pintes en parlant politique, récoltes et météo. Sa voix de ténor amenait la larme à l’œil autant que ses acrobaties provoquaient des éclats de rire. Mais Liam rêvait de voir le monde et de gagner beaucoup d’argent. Peu avant ses seize ans, il quitta la maison, ses maigres économies en poche, et s’embarqua pour l’Amérique dans une cale bondée de jeunes gens nourrissant les mêmes ambitions que lui. Quand le navire roulait et tanguait, dans la tempête, que l’air confiné empestait le vomi et la peur, il bénissait sa robuste constitution.
Par beau temps, il chantait et dansait à la demande de ses compagnons de voyage, et il écrivait de longues lettres à sa famille, qu’il posta toutes à la fin de la traversée.
Il échangea quelques baisers avec une jolie blonde de Cork, Mary, qui se rendait à Boston où on lui offrait un poste de bonne dans une grande maison. Ce fut avec elle, sur le pont, qu’il aperçut enfin la statue de la Liberté à l’horizon, promesse d’une vie nouvelle.
La foule, le bruit, l’agitation… Un monde séparait New York du petit hameau de Glendree, mais ce monde deviendrait le sien.
Commenter  J’apprécie          20





Ont apprécié cette citation (2)voir plus




{* *}