Tolstoï dégage et le sens et l’absurdité de la guerre. Tuer un homme ne signifie rien et en être tué signifie moins encore. On subit dans la guerre le règne de l’horreur pure – car l’horreur est pure, c’est la raison qui est entamée, outeuse, perverse, paradoxale. Mais il y a aussi la terre russe, ingrate, poisseuse, sombre, dégoûtante – qu’il faut préserver. Et il y a l’âme russe, la plus sombre et la plus innocente, hagarde, flemmarde, malchanceuse, sainte – qu’il faut sauver. Alors, d’un coup, la guerre, c’est-à-dire l’abjection, trouve un sens. Et c’est dans ce sens intime, poignant, douloureux et majestueux, que se déploie le roman du comte Tolstoï.