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Citation de robertrene


Patrick's O'Nolan
— Cher Fred, dit-elle alors, j'aimerai que vous m'expliquiez comment vous est venue l’idée de cette chanson Krim kont la Gwadloup si emblématique. Cela m’intéresse comme écrivaine, et comme militante.
— D'un point de vue strictement musical et suivant les épo-ques, plusieurs influences, jazzy, africaines et brésiliennes, m'ont nourri. Néanmoins, je suis extrêmement fidèle aux diverses traditions musicales héritées de l'esclavage, comme le Gwo ka ou les percussions de bouche du Boula gyél. Pour l’écriture, on me qualifie ça et là d'auteur engagé. Cependant, je ne prétends donner aucune leçon. Je me pose des questions. C'est tout. Et en conséquence, j'en pose aussi aux autres. Je fais simplement des constats. En réalité, ce qui est pour moi le plus important est de transmettre les impressions que j'ai sur mon pays, sur ses difficultés identitaires et donc, culturelles.
Je l'écoutais attentivement d'autant que son propos provo-quait une résonance en moi.
— Vous savez Fred, mon identité guadeloupéenne me pose quelques difficultés. Je suis blanche, j'ai vécu très longtemps dans un pays métissé de la plus belle manière. Indiens, Blancs, Noirs, Guadeloupéens quoi ! Je suis française, bien que je me sois toujours sentie une française... de loin.
— Je n'aurais pas pu dire mieux Mila ! Vivre au sein de cette nation française n’est pas chose aisée. Je suis légalement fran-çais, mais comme vous, j'éprouve un sentiment d'appartenance différent. Je ne me sens pas black non plus. D'ailleurs, je ne sais pas ce que cela signifie exactement. Je suis d’accord avec vous sur ce qui constitue ma communauté et je me sens plus proche d'un Blanc péyi ou d'un Indien guadeloupéen que d'un Noir américain. La jeunesse actuelle d'ailleurs qui ne s’illusionne pas sur l’Europe, s'exprime en créole ou en anglais. Ma grand-mère était claire de peau et n'aimait pas les Noirs. Voilà notre réalité. Nous avons une identité à la carte. Un Guadeloupéen est pro-européen quand ça l'arrange, quand la France prend des décisions qui le dérangent, pro-français quand l'Europe l'embarrasse et foncièrement guadeloupéen quand il croise un métro qui l'énerve. Cela se fait quasi instinctivement. Aujourd'hui en Guadeloupe, la tendance est au racisme anti-haïtien. Il faut trouver un bouc émissaire à notre échec économique et social. Le racisme est toujours utilitaire. Curieusement, il est parfois dirigé contre nous-mêmes. Et malheureusement, il est partie intégrante de notre culture créole.
Simone l'interrompit gentiment.
— Vous avez raison Fred ! Pourtant dans votre chanson, vous semblez prendre le contre-pied de l'attitude consistant à accuser unilatéralement la Métropole et c'est ce qui m’intéresse.
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