Ceci est l'équivalent BD d'un blockbuster bourré de scènes d'action avec une caméra flou qui n'arrête pas de bouger.
Les dessins sont affreux.
Je sais, Pope est un espèce d'artiste indépendant bien réputé qui fait des trucs originaux et marginaux. Je sais, ce comic est la preuve que DC est prêt à prendre des risques pour renouveler leurs personnages phares.
Cool.
Mais ce comic demeure indigeste.
L'histoire : On est en 2039, 100 après la première apparition de Batman. Depuis, Gotham est devenue une ville dystopique un peu cyberpunk. Avec un Gouvernement autoritaire qui fiche tout ses citoyens et des caméras partout qui les identifie. Cliché à fond.
Arrive un nouveau Batman, qui sort de nulle part, que les caméras sont incapables d'identifier, qui a des super pouvoirs (?). On a aucune idée qui c'est (on ne le saura jamais). Le Commissionnaire Gordon (petit-fils du Commissionnaire Gordon de 1939... *soupir*) enquête, et se fait retirer l'enquête par l'équivalent du FBI/Police secrète.
J'arrête de raconter l'intrigue ici, parce qu'elle ne déroge pas d'une ligne du scénario que vous avez dans votre tête en lisant les éléments de départ.
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Magistral.
Épatant.
Visionnaire.
Bref, du lourd !
Pope nous offre le récit d’une aventure de Batman en 2039, dans un pays où souffle un vent de fascisme. Sans jamais nous le dévoiler clairement, l’auteur crée un univers dystopique où le totalitarisme a semble-t-il gagné. C’est dans ce monde étouffant que l’homme chauve-souris lutte pour défendre ce qu’il reste de liberté individuelle.
Ça fleure bon le libertarianisme et on prend plaisir à voir Batman en terroriste.
Loin de l’usage des habituels gadgets, Bruce Wayne s’en remet plus volontiers à la force physique et ses duels sont bien plus prenants « scénaristiquement » et graphiquement parlant.
La force du projet de Pope est de se détacher de l’original dans la composition du scénario mais en même temps d’avoir su garder les fondamentaux qui font la force du personnage. Le dessin est riche. Net et en même temps flou, il se marie parfaitement avec le thème et l’atmosphère de l’intrigue.
N’oublions pas le bonus, où Baruch Wane, riche juif Allemand amateur de cubisme qui, en 1939 à Berlin, enfile le costume de Batman pour partir sauver les écrits de Ludwig von Mises.
Ludwig qui ? Un économiste américain, d’origine autrichienne, qui a influencé le courant libertarien. Courant qui prône dans un monde économique libéral, la liberté individuelle en, tant que droit naturel. Vous voyez le lien avec la première partie ?
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C'est vrai que l'idée de ce monde futuriste oppressant est originale mais j'ai eu beaucoup de mal à m'y faire car les codes sont beaucoup trop éloignés de l'univers de Batman ce qui est franchement déstabilisant.
Par ailleurs, le dessin ne m'a franchement pas convaincu par son côté brouillon et son manque manifeste de clarté dans les détails. Pour s'en convaincre, il suffit de voir la tête de Batman : presque un monstre animal réellement repoussant ! Mon Dieu, ses dents aiguisés et ses poils !!!
Pour le reste, l'histoire fait la part belle à l'action au détriment de l'intrigue. J'aurais nettement préféré le contraire avec plus de psychologie.
Toutefois, l'ensemble demeure un travail honnête qui semble restituer une ambiance particulière dans une course folle qui ne laisse aucun répit au lecteur. Un bon divertissement et rien de plus !
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Ce tome comprend une histoire complète et indépendante de la continuité, initialement parue en 2006, ainsi qu'une histoire courte parue dans "Batman chronicles" 11. Paul Pope a réalisé le scénario, les dessins et l'encrage, la mise en couleurs est de José Villarrubia (sauf pour l'histoire courte mise en couleurs par Ted McKeever). Le nombre 100 correspond au fait que l'histoire se déroule en 2039, soit 100 ans après la première apparition de Batman en 1939, dans "Detective comics" numéro 27.
Quelque part sur les toits de Gotham toujours aussi sale et usée, Batman bondit d'immeuble en immeuble (sans grappin, un parkour très physique), avec une meute de chiens féroces à ses basques. Il est blessé au coté droit. Après un saut impressionnant, il descend dans un immeuble, avec une section de policiers du FPC à ses trousses. Au QG du FPC, L'agent Pravdzka refuse de croire que cette légende urbaine qu'est Batman puisse avoir un quelconque fondement. Il suit la course-poursuite par caméra avec une grande appréhension. Batman a assisté à l'assassinat d'un policier par un autre policier dans le cadre d'une transaction illicite. Par un concours de circonstances, il est accusé du meurtre. De son coté, le commissaire James Gordon se voit interdit de présence sur la scène du crime, car le FPC estime qu'il s'agit d'une affaire fédérale. Tant bien que mal, Batman réussit à rejoindre une de ses bases dans un immeuble où il est soigné par la doctoresse Goss, et sa fille Tora. Un individu appelé Robin également membre de son équipe apporte un soutien logistique. Coté FPC, l'agent Pravdzka a demandé l'intervention de l'agent Tibble qui explique les règles du jeu à Gordon.
Paul Pope est un créateur indépendant à la personnalité graphique très affirmée qui a également réalisé 100%, Heavy Liquid. Comme le montre la couverture (style identique aux pages intérieures), il n'hésite pas rajouter des petits coups de crayon secs pour montrer que chaque surface (organique ou manufacturée) est marquée par le temps, les chocs et les coups. Il a recours à des aplats de noir conséquents pour donner du poids à ses dessins, mais aussi pour transformer Batman en une silhouette mystérieuse qui semble absorber la lumière, sans la réfléchir. Le lecteur s'immerge donc un univers urbain usé par le quotidien, où rien ne semble pouvoir être neuf ou brillant. La mise en couleurs de José Villarrubia est, comme à son habitude, bien pensée. Il sait aussi bien utiliser des teintes inattendues (rose, ou orange) pour créer une ambiance unique dans une scène, que jouer sur une palette restreinte tout en faisant ressortir chaque surface.
Pope a choisi de donner une silhouette plus trapue que d'habitude à son Batman. Il dépeint un Batman à la morphologie réaliste, très mystérieux (on n'aperçoit son vrai visage que partiellement le temps de quelques cases), pour qui chaque performance physique s'accompagne d'un coût, comme dans la vie réelle. Il est essoufflé quand il court vite, il grimace sous l'effet de l'effort, etc. Il s'agit d'un personnage qui est en activité depuis 100 ans, dont on ne connaît pas l'identité. James Gordon (le petit fils du James Gordon) trouvera bien quelques éléments mais il ne les partagera pas avec le lecteur.
Pope fait régulièrement référence à des éléments du mythe de Batman, à commencer par un technicien surnommé Robin (mais il n'y a pas de Batcave), avec un commissaire intègre appelé James Gordon, en insérant des noms connus dans les dialogues (de Crime Alley à Crispus Allen, en passant par Sprang et Adams, des références à Dick Sprang et Neal Adams), sans que cela ne devienne une composante majeure. Dans la structure de son récit, il est également possible de distinguer d'autres références. Lors d'une scène de déduction, il met en parallèle le travail de Batman et celui de James Gordon, reproduisant le schéma adopté par Frank Miller dans Année un. À l'évidence, le point de départ dans le futur avec une cité peu accueillante évoque forcément The Dark Knight returns. Mais l'ambiance en est fort différente, il n'y a pas d'autres individus costumés et le récit n'est pas polarisé sur la volonté implacable d'une force de la nature vieillissante.
Il reste donc une enquête pour déterminer les causes de l'assassinant du policier, avec un Batman presque désincarné, par vraiment une force de la nature, mais plutôt un concept épuré. Ce Batman est l'archétype de l'homme cagoulé avec un costume bizarre (et une cape) qui agit en marge de la société pour redresser les torts. Son identité importe peu, la nature de son aisance financière n'a aucune espère d'intérêt, ses motivations sont secondaires, seul importe son refus des exactions de l'autorité établie. C'est un beau défi que se lance Paul Pope de transformer un superhéros en l'incarnation d'une idée. Mais la contrepartie implique qu'une partie des scènes plus pragmatiques de l'histoire deviennent inutiles. Finalement, les découvertes relatives de Gordon sur le passé de Batman ne servent en rien l'histoire, autant de cases inutiles. Les scènes d'action sont remarquables de vitalité, mais là encore l'enjeu est nul puisque rien ne peut arrêter une idée. Les motifs du crime tiennent la route d'un point de vue logique, mais ils ne révèlent rien sur Batman, ou sur l'ordre du monde dans lequel il évolue.
Au travers de ce récit, Paul Pope a su développer une approche originale de Batman, assez ambitieuse en en faisant plus une idée qu'un individu. Ses dessins en font un homme athlétique, puissant, faillible, souffrant dans l'effort physique, évoluant dans un monde confiné sans être surpeuplé. Il s'agit d'une immersion dans un environnement inattendu et particulier. Les scènes d'action bénéficient d'un découpage très efficace, mettant en évidence le danger pour le personnage principal, la force des coups (sans tomber dans le sensationnalisme), la douleur sans complaisance. Mais au fur et à mesure, le lecteur est conduit à se désintéresser de Batman qui ne génère aucune empathie, sans pouvoir se raccrocher à d'autres personnages sur le plan émotionnel. Paradoxalement, alors que Batman gagne en ambiguïté, les conflits perdent de leur intérêt, ne sont plus que des prétextes sans âme.
Au final, l'appréciation du lecteur dépendra de ce qu'il est venu chercher. S'il souhaitait lire une histoire de Batman originale dans un futur dystopique sans être trop éloigné du notre, le voyage est agréable, marquant, avec quelques frustrations nées du caractère insaisissable de Batman, de son manque de tangibilité, 4 étoiles. Si le lecteur espérait un récit viscéral, ou au contraire plus intellectuel, il sera un peu déçu par une aventure reposant sur une construction très classique de roman policier, avec un concept central unique et pas abouti.
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Heavy Liquid est une BD étonnante et surprenante. Basée sur un mélange de plusieurs genres, elle pose une histoire assez originale et qui s'en va en tous sens, avec une certaine irrévérence envers les genres, mais aussi quelques petites touches d'humanité qui parsèment une oeuvre plutôt sombre. Bref, une BD underground totalement dans les canons du genre.
Je commencerais immédiatement par le point qui m'a déçu : la fin. En effet, elle est si bien trouvée que j'étais frustré d'une seule chose, que ça se finisse si tôt. Il y aurait eu matière à développer plus, plus loin, mais l'auteur a voulu s'arrêter à ce point-là, ce que je comprends mais n'approuve pas.
Le reste est d'excellente facture : le dessin, dynamique et nerveux retranscrit très bien les différentes scènes d'action, mais aussi l'ambiance très sombre et punk de ce futur dystopique. Les bouches me semblent parfois étranges, mais c'est le style de l'auteur et cela ne m'a pas dérangé dans ma lecture.
L'histoire mélange plusieurs codes, roman noir, dystopie, drogue, science-fiction, mafieux, dans un mélange très peu indigeste et qui sent à la fois l'intérêt pour ces genres underground, et en même temps l'appropriation des codes dans une histoire cohérente et intéressante. J'ai beaucoup aimé les façons dont les personnages sont développés petit à petit, avec quelques petites touches d'humanité qui transparaissent dedans. Mine de rien, j'ai l'impression qu'un message sous-jacent traverse la BD, sur la jeunesse et ses idéaux, la perte de repère dans un monde trop noir, et quelques petits détails sur l'acceptation sociale notamment. Bref, plusieurs petites thématiques intéressantes et qui donnent de l'intérêt à la relecture.
SI je ne dirais pas que c'est une BD fabuleuse et inoubliable, c'est clairement une bonne BD que j'ai aimé lire. Un conseil de lecture recommandé, si vous le dénichez quelque part !
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New-York, 2075. Stooge, alias ‘S.’, vient de dérober une grosse quantité de Heavy Liquid à un mystérieux cartel du crime. Cet ancien flic reconverti dans le banditisme est également accro à cette substance aigre comme du chrome massif, qui procure un sentiment d’invincibilité et donne la sensation de voir le monde à travers 15 éclats d’un miroir brisé. Poursuivi par Crac, Kip et Coupé, trois tueurs masqués au service du patron de la pègre, ‘S’ doit maintenant accomplir une tout autre tâche pour le commanditaire de ce vol. Gaylord Schmeltz, alias LE Collectionneur, lui demande de retrouver la plus grande artiste de l’époque afin de couler une œuvre d’art parfaite dans un alliage à base de cette drogue métallique qu’il vient de subtiliser. S’il parvient à échapper aux truands lancés à sa poursuite, ‘S’ risque toutefois de se faire rattraper par le passé car cette sculpteuse de renom qui a disparu depuis près de cinq ans ne lui est pas vraiment inconnue.
Avec deux parutions simultanées sur le marché francophone (Heavy Liquid chez Dargaud et Batman Année 100 chez Panini), ce maître de la bande dessinée underground, encore récemment couronné aux Eisner Awards, semble enfin percer de l’autre côté de l’Atlantique. La trame de cette œuvre emblématique de Paul Pope n’a pourtant rien de vraiment original : un antihéros, un énigmatique commanditaire, une ancienne flamme et un passé qui revient au galop. Ce sont donc surtout les propriétés intrigantes et la provenance inconnue de cette substance hallucinogène qui constituent l’intérêt principal de ce jeu du chat et de la souris entre ‘S’, la femme qu’il recherche et les assassins qui lui collent aux basques.
Malgré quelques accents novateurs, principalement au niveau des moyens de communication et de transport (NY – Paris en trente minutes), l’auteur dépeint un monde qui ne diffère pas trop du nôtre au niveau technologique. Le futur mis en place par Pope, situé dans un cadre glauque qui se caractérise par des ruelles sordides et des appartements délabrés, est à la fois familier et inquiétant. Demeurant toujours en dehors des sentiers battus, Paul Pope livre un one-shot à la croisée des genres, entre comics, manga et BD franco-belge. Des influences plurielles qui se retrouvent également au niveau du graphisme, avec une galerie d’art inspirée de la sculpture de l’artiste belge Panamarenko et des masques de méchants à la Picasso. Le trait dynamique et précis de ce dessinateur hors pair est très efficace sur les scènes d’action, tandis que la colorisation bichromique accentue le côté légèrement rétro de l’univers rock’n’roll sixties/seventies insufflé par Pope.
Malheureusement, si cette œuvre, dont le titre et le nom du personnage principal s’inspirent du travail d’Iggy & The Stooges, excelle au niveau graphisme et ambiance, le scénario et la narration demeurent un peu à la traîne. L’intrigue a du mal à émerger : plusieurs pistes sont trop peu développées et certaines longueurs auraient pu être évitées. Cependant, le style de Paul Pope restant inimitable, les nombreux fans n’hésiteront pas à se jeter sur ce thriller urbain d’anticipation mélangeant courses poursuites, art et histoire d’amour.
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