Un des soldats, un gars de Logroño qui étudie pour devenir instituteur, m'a dit que ce sont les Arabes qui ont apporté le poivre d'Extrême-Orient. C'est pas croyable! Si je savais lire, je lirais des livres sur le poivre.
Le pire secret de la mer, ce sont les méduses, qui existent à peine et menacent sans qu'on les voie, sans qu'on puisse deviner qu'elles flottent juste à nos côtés. Elles me rappellent ces peurs qui parfois nous assaillent sans raison, ou cette tristesse qui inonde nos poumons et nous noie dans le chagrin quand on s'y attend le moins, ou encore ces idées noires qui hantent notre esprit et nous font sentir mesquins parce qu'on ne peut s'empêcher de les suivre comme on courrait après des papillons.
L'arrivée de septembre avait couvert l'horizon de nuages bas et denses, et Cabrera donnait l'impression de se dresser au milieu d'un lac entouré d'une terre lointaine recouverte de cotons de plomb. Les journées étaient encore chaudes, mais à la tombée du jour une brise soufflait ses frissons sur la mer qui moutonnait comme si les bancs de poissons géants la faisait bouillonner.
Sans le savoir, Benito Buroy avait trouvé ce qu'il désirait tant depuis la fin de la guerre, un endroit qui lui permettait de vivre loin de tout, du temps et de l'histoire, un endroit où l'ambition perdait toute signification et où les souvenirs pouvaient s'estomper jusqu'à s'effacer complètement.