De dépit, j’avais mis ma tête entre mes mains, mains que j’avais descendues ensuite lentement le long de mes yeux, mon nez et mon menton afin de ne pas éclater, puis je lui avais expliqué calmement :
— Donc tu as un rendez-vous avec un type auprès de qui nous avons pris une fausse réservation, en utilisant le faux nom dont se sert une autre personne pour ses parties de jambes en l’air ? C’est bien ça ? Rassure-moi, tu ne lui as pas donné ton nom ?
— Bien sûr que non, juste mon 06.
le père Jérôme, c’était quelque chose… Lui, ce n’était pas trente-cinq, ni même cinquante ans de retard qu’il accusait, mais bel et bien plusieurs siècles. Trapu et gras, plutôt pâle de peau, ses yeux extrêmement bleus et cette coupe surannée lui donnaient l’air factice d’une statue de cire. Était-ce parce que le sauvage appelait l’endroit Sherwood ? Toujours est-il qu’en le regardant je ne pouvais m’empêcher de penser à frère Tuck qui aurait troqué pour l’occasion sa tunique contre une doudoune bleue.
En faisant traîner les secours à la vue de tous, il savait forcément qu’il aurait droit à des remontrances de sa hiérarchie, et qu’il serait peut-être même destitué de son poste, mais c’était de toute évidence pour lui le prix à payer. De toute façon, j’étais certaine qu’il s’en moquait : lui aurait vengé les membres de son équipe et protégé les secrets de son unité, et c’était probablement tout ce qui lui importait.
Les mauvais chemins mènent parfois aux bons endroits…
Face à l’entrée, de gros anneaux en acier étaient solidement fixés au mur. Il y en avait un peu partout, en tout cas assez pour attacher au mur jusqu'à deux ou trois personnes. Comme j’étais seule, ces raclures n’avaient eu que l’embarras du choix. Est-ce par voyeurisme, pour m’humilier ou par crainte que je parvienne à m’enfuir ? Toujours est-il qu’ils m’avaient entièrement déshabillée.