Il est très difficile d'expliquer la passion de l'alpinisme à quelqu'un qui ne la connaît pas : pourquoi, lorsque l'on pourrait être tranquillement au bord de l'eau, à la campagne ou sur un sentier de randonnée, choisir de partir à une heure du matin pour affronter le froid, s'écorcher les doigts, s'essouffler, s'épuiser, se faire mal et, parfois aussi, véritablement, se mettre en danger ? Où se situe le plaisir ? Dans l'adversité ? Dans la mesure de ses faibles capacités ? Dans la récompense vaine et passagère d'avoir triomphé de quelques obstacles ? Ces questionnements m'ont toujours intéressé. Je crois que le très beau titre de Lionel Terray "Les conquérants de l'inutile" résume bien toute la démarche : on se rend les maîtres de ce qui n'a aucune valeur.