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Critiques de Pierre Khalfa (6)
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Changer vraiment ! Quelles politiques économi..

Définir une communauté d’intérêts et d’objectifs



« C’est une crise d’un système à bout de souffle, le capitalisme néolibéral, qui s’articule avec une crise écologique et une crise de civilisation, où les bases mêmes du fonctionnement démocratique et de la vie en société sont remises en cause. » Et depuis le début de la crise « c’est une fuite en avant vers la reproduction des mécanismes mêmes qui y ont conduit… »



Pour les auteur-e-s, ce qui devrait être au cœur d’une politique de gauche, c’est la satisfaction des besoins sociaux et les exigences de la transition écologique.



A juste titre, elles et ils concluent leur introduction : « En mêmes temps, il (un tel programme) ne peut être mis en œuvre qu’en s’appuyant sur des mobilisations sociales, elles-mêmes fondées sur les premiers changements tangibles qu’il aura initiés pour la majorité de la population. »



L’ouvrage est composé de trois parties :



« Les conditions de la transformation sociale »



Comme l’indiquent les auteur-e-s, des interrogations légitimes taraudent toute tentative de transformation sociale. « C’est pourquoi il y a trois conditions à tout processus de transformation sociale : retrouver des marges de manœuvre économique, lever l’hypothèque de la dette, réduire le pouvoir de la finance. A défaut, un gouvernement de gauche ne peut au mieux que s’embourber, au pire, et c’est le plus probable, mettre en œuvre des politiques néolibérales ». Elles et ils analysent les réalités et font des propositions sur un autre partage de la richesses produite et un réarmement fiscal. Le chapitre sur « les bienfaits de la création d’emplois et du pouvoir d’achat » est d’autant plus intéressant qu’il indique « Favoriser l’augmentation du taux d’activité des femmes et agir pour l’égalité de salaires entre les femmes et les hommes permettrait d’améliorer radicalement le financement des retraites par la croissance du volume de cotisations ». La place de la réduction du temps de travail et la lutte contre le temps partiel imposé sera traité dans un autre chapitre.



Pour s’attaquer « aux causes de la dette proprement libérale », trois principaux moyens seront analysés « une réforme fiscale radicale, l’examen de la légitimité de la dette et la maîtrise de la création monétaire ». Pour permettre aux lectrices les lecteurs, de s’orienter, une petite présentation synthétique des « débats sur la monétisation de la dette publique » est incluse.



« Engager la rupture »



« En France, la part des dividendes dans la valeur ajoutée est ainsi passée de 3% en 1981 à environ 9% en 2008 tandis que les salaires déclinaient fortement par rapport à eux ». Sans oublier que « Le Smic est devenu une norme, car il permet aux employeurs de s’affranchir de deux institutions constitutives du salaire : les qualifications négociées dans les conventions collectives et les cotisations sociales par le biais des multiples exonérations ».



Les inégalités en terme de salaires se sont amplifiées, et les femmes sont toujours sous-payées « Tous les temps de travail confondus, les femmes touchent en moyenne 27% de moins que les hommes, ou dit autrement les hommes touchent 37% de plus que les femmes. Si on ne compare que les salaires à temps complet, l’écart est de 19%. Les femmes et les hommes n’occupent pas les mêmes postes, si l’on compare alors à poste et expérience équivalents, il reste un écart inexpliqué de 10% », comme le soulignent les auteur-e-s c’est une « mesure de discrimination pratiquée par les employeurs à l’encontre des femmes ».



Il faut donc à la fois réduire les inégalités, favoriser le partage des richesses et mener une politique favorable à l’emploi. A la fois sécuriser les salarié-e-s, refaire du CDI la norme, renforcer et étendre les droits des salarié-e-s au sein de l’entreprise et réduire le temps de travail « semaine de quatre jours par exemple, soit 32 heures de travail hebdomadaires ». Les auteur-e-s concluent cette partie sur la « Bataille pour une autre Europe »



« Amorcer un nouveau mode de développement »



« La crise capitaliste laisse les sociétés dans un état de délabrement social inouï, et révèle en même temps l’impasse d’une accumulation fondée sur un développement productiviste qui épuise la terre et les ressources, pollue l’eau et l’air, réduit la biodiversité et réchauffe le climat ». Il convient donc à la fois d’étendre « le domaine public à des activités répondant aux besoins sociaux, délaissées par le marché » et mettre en œuvre « une véritable transition écologique ». Et les auteur-e-s ajoutent dans cette approche « La lutte séculaire pour l’émancipation humaine prend aujourd’hui une dimension longtemps négligée : l’égalité entre femmes et hommes est déterminante pour la réussite d’une véritable transformation sociale. Elle est transversale à toutes les luttes sociales et elle donne même à celles-ci une dimension supérieure. Elle implique des politiques publiques instaurant une égalité réelle dans tous les domaines, l’emploi, les salaires, les retraites, l’éducation, le droit, etc. Elle implique aussi une réduction du temps de travail dans les entreprises et un partage des tâches domestiques. L’égalité entre hommes et femmes n’est pas un supplément sur le social, elle en est le cœur ».



J’ai particulièrement apprécié le chapitre 8 « Réindustrialisation écologique, nouvelles coopérations ». Au « produire autre chose, produire autrement », j’ajouterais la dimension de contrôle et d’autogestion.



Les auteur-e-s insistent à la fois sur la durabilité, la modularité et la soutenabilité « La durabilité, c’est mettre fin à l’obsolescence programmée. La modularité, c’est économiser les faux frais résultant de l’absence de standardisation et de réparabilité des produits. La soutenabilité, c’est réduire le coût en énergie et en émission de gaz à effet de serre de la fabrication et de l’usage de ces biens ».



Elles et ils nous proposent, non un repli frileux sur le national, voir l’européen, mais une coopération élargie passant par « des transferts technologiques nécessaires pour accompagner la lutte contre le réchauffement climatique à l’échelle de la planète. »



Le chapitre 9 traite spécifiquement de l’égalité économique entre les femmes et les hommes. Les auteur-e-s développent leurs analyses contre le temps partiel, les horaires atypiques, la notion de conciliation et argumentent pour la réduction du temps de travail. « L’enjeu doit être autant le partage du travail rémunéré que celui du travail non rémunéré accompli dans la sphère privée. »



Comme je l’ai souligné, le refus des inégalités entre femmes et hommes est, pour une fois, pris largement en compte et structure de nombreuses propositions. Le constat « Combattre les inégalités entre les femmes et les hommes n’est donc pas seulement un objectif de justice sociale, ce qui serait en soit suffisant, c’est aussi un moyen de contrecarrer le fonctionnement global du système en s’en prenant à ses profits. L’enjeu des politiques pour l’égalité entre les sexes est ainsi partie intégrante de l’objectif d’une transformation sociale radicale à gauche, ainsi que des moyens pour y parvenir », me semble insuffisant. Il faut attendre la sixième idées-forces, en conclusion, pour lire « Affirmer la centralité de la lutte contre la domination masculine, et de l’égalité entre les femmes et les hommes comme objectifs autant que comme moyens d’une réelle transformation sociale » (souligné par moi). Et en effet, la lutte contre la domination masculine (patriarcat, rapports sociaux de sexe, système de genre), contre toutes les dominations sont une condition, irréductible à la lutte contre le capitalisme, pour permettre d’entrevoir un avenir émancipé pour toutes et tous.



Les différentes propositions relèvent du débat politique démocratique, loin des impostures déguisées en vérité intangible et non discutable du néolibéralisme et de son culte quasi-religieux du marché et de la concurrence libre et non faussée. Si « tout n’est pas possible », « tout » devrait relever de débats et de choix démocratiques, non d’imposition de règles inventées par des experts auto-définis. « Renouer avec l’espoir, celui de la possibilité d’un avenir collectif maîtrisé, c’est de cela, en définitive, qu’il a ici été question. »
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Tableau d'un glissement néolibéral

Une consolidation, un prolongement, une aggravation de bien des réformes néolibérales



Dans leur introduction, les auteur-e-s reviennent sur le contexte actuel et en particulier sur la crise du régime d’accumulation du capitalisme, la crise écologique, la construction européenne antidémocratique, etc. Elles et ils soulignent les « ambiguïtés » de la campagne électorale de François Hollande, et mettent en perspectives les mesures prises ou non par le gouvernement depuis un an. Cela permet de dresser un premier bilan, de souligner les choix politiques, la pente réaffirmée du néolibéralisme.



Le tableau, l’inventaire dressé n’est pas d’une seule couleur. Cependant dominent des choix qui vont à l’encontre des intérêts et des besoins de la majorité de la population.



Inventaire :



17 octobre 1961, Accidents du travail, maladies professionnelles, Aide médicale d’État, Amiens, Accord national interprofessionnel (ANI), Arcelor, Audiovisuel public, Aurore Martin, Avortement (IVG), Base élèves, Budget, Cahuzac, Chômage, Circulaire Valls, Climat, Code du travail, Collectivités territoriales, Complémentaires santé, Contrôle d’identité, Coût du travail, Crédit impôt recherche, Délinquance, Dette et déficit public, Dialogue social, Droit de grève, Droit de vote des étrangers, Éducation artistique, Égalité femmes-hommes, Emplois d’avenir, Emplois fonction publique (création), Emplois fonction publique (suppression), Encadrement des loyers, Enseignement supérieur-Recherche, Étudiants étrangers, Flexibilité, Formation des enseignants, Franchises médicales et déremboursement de médicaments, Fraude fiscale, Georges Ibrahim Abdallah, Guerre d’Algérie, Hôpital public, Impôt sur le revenu, Impôt sur les sociétés, Impôt de solidarité sur la fortune, Journée de carence dans la fonction publique : une suppression positive, Justice (Taubira), Justice des mineurs , Licenciements, Livret A, Livret personnel de compétences, Loi Ciotti, Loi d’orientation et de refondation de l’école, Maison de l’histoire de France, Mali, Mandats (non-cumul des), MAP (Modernisation de l’action publique), Mariage, Médecine du travail, Médecins (dépassements d’honoraires), Médecins (déserts médicaux), Medef, Montebourg, Morale laïque, Naturalisations, Niche fiscale Duflot, Notre-Dame-des-Landes, Pacte budgétaire (TSCG), Pacte de compétitivité, Palestine, Partenariats publics privés (PPP), Pauvreté, Pétroplus, Pigeons, Pôle emploi, Politique agricole, Politiques culturelles, Pouvoir d’achat, Précarité, Prison, Prostitution, PSA 129, PSE (plan de sauvegarde de l’emploi), Récidive, Refiscalisation des heures supplémentaires, Réforme bancaire, Réforme du lycée, Répression syndicale, Retraites, Rroms, RSA, Rythmes scolaires, Salaires des fonctionnaires, Sans-papiers (circulaire Valls), Sans-papiers (expulsions et rétentions), Smic, Socle commun, Soutien à la production de logements sociaux, Taubira (Christiane), Taxation à 75 %, Taxe sur les transactions financières de Hollande, Temps partiel, Transition énergétique, TVA sociale, Valls, Violences, harcèlement.



Pourtant une autre politique est possible. Elle devrait favoriser et s’appuyer sur les mobilisations, l’auto-organisation des populations. Elle passe, entre autres, par des empiétements dans le droit de propriété lucrative, une amélioration immédiate de la situation du plus grand nombre, des reconversions industrielles d’ampleur pour rompre avec le productivisme et satisfaire les besoins, une réduction massive du temps de travail et des mesures concrètes pour lutter contre toutes les discriminations.



Il faut donc une « Une gauche qui redonne aux salarié·es, aux retraité·es, aux demandeur·euses d’emploi, à l’ensemble des citoyen·nes du pouvoir et des droits, qui impose un autre partage des richesses et d’autres choix économiques, sociaux et culturels. C’est ce à quoi travaille la Fondation Copernic, en essayant de construire les convergences nécessaires entre toutes celles et ceux qui partagent ces objectifs »
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Un président ne devrait pas faire ça

Dans son introduction,Pierre Khalfa revient sur la campagne électorale de François Hollande, la phrase d’un soir de meeting – Mon ennemi c’est la finance », sur ce bilan qu’il convient en effet de considérer comme « désastreux pour un président de la République se réclamant de la gauche »



Le préfacier n’oublie pas l’avancée majeure que constitue la loi sur le mariage pour tous-tes. Mais cette loi ne saurait masquer les reniements et les renoncements. La liste est longue et cette note ne peut prétendre à l’exhaustivité…



Pierre Khalfa insiste sur l’alignement sur la pensée libérale en matière économique, « l’offre crée sa propre demande », la défenses des intérêts des patrons et le « j’aime l’entreprise »  du Premier ministre lors de l’Université du Medef, le tournant néoconservateur accompagnant le tournant libéral, la remise en cause des libertés démocratiques « avec la multiplication de mesures qui n’ont eu aucun effet en matière de sécurité, mais qui constituent autant d’attaques contre l’État de droit », les débats pitoyables de la déchéance de nationalité (mesure prônée par l’extrême droite et la droite extrême), les obsessions identitaires (Manuels Valls et ses déclarations : « nous sommes une vieille nation chrétienne » ou « l’essentiel, c’est la bataille culturelle identitaire »).



Pierre Khalfa termine ainsi : « Un bilan calamiteux qui laisse le peuple de gauche totalement désorienté, la gauche éclatée et le Front national à son zénith. Triste quinquennat qui s’achève dans la décomposition du paysage politique, la crise démocratique, dont l’usage du 49.3 pour faire adopter la loi « Travail » et le procès Cahuzac, ont rappelé l’actualité et la crise économique et sociale illustrée par l’épisode Alstom. C’est dire que la reconstruction d’une gauche de transformation sociale et écologique est aujourd’hui à l’ordre du jour. »



introduction et deux chapitres disponibles sur le blog "entre les lignes entre les mots" avec l'aimable autorisation des Editions Syllepse



Il est important d’essayer de synthétiser l’ensemble des mesures prises, de donner corps aux politiques menées, de lister ces « renoncements » qui ont fait de ce quinquennat un quinquennat de droite.



Et, ce n’est pas un élément anodin, les mesures adoptées faciliteront d’autres attaques contre les droits des salarié-e-s et des citoyen-ne-s par les prochains gouvernements, probablement de droite voire de droite extrême.



Chacun-e pourra trouver ici des raisons d’indignation, de colère… et des explications sur les politiques menées et assumées.
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Europe, l'expérience grecque : Le débat stratégique

Prendre le temps qu’il faudra. Mais cela ne doit pas attendre.



Contre la « neutralisation » masculine, mais pas seulement, des rapports sociaux, l’importance de « rechercher des récits alternatifs sur la crise, de façon à déséquilibrer ceux qui sont présentés comme les seuls évidents », les dimensions genrées de la crise économique en Grèce, les effets de visibilité ou d’invisibilité du genre en cette période, le renforcement des significations « femmes » et « hommes » comme différence naturelle entre sexes…



Je reprends ici des éléments de ma note de lecture de Contre Temps N°27 (octobre 2015)



« Que s’est-il passé ?



A quelles limites s’est-on heurté ?



Quelles erreurs ont été commises ?



Sur toutes ces questions le débat est vif. Il est indispensable



Mais il peut être ravageur. Il convient de le mener avec beaucoup de liberté et de sérieux. »



Voir : destabiliser-la-parole-patronale-en-denudant-les-fils-et-en-avancant-des-exigences-qui-visent-a-unifier-plutot-que-cliver/



Il me semble important que des différentes appréciations ou analyses sur l’« expérience grecque » donnent lieu à des confrontations. Mais je regrette le ton péremptoire utilisé parfois…



Je ne vais pas ici exposer l’ensemble des positions. Ni sur ce qui semble faire accord (défaite politique majeure, caractère insoutenable de la dette, etc.), ni sur ce qui fait désaccord (la question de l’euro et plus largement les appréciations sur l’Europe).



Je ne cache pas que je suis plutôt en accord avec les positions développées dans le livre Attac, Fondation Copernic : Que faire de l’Europe ?. Désobéir pour reconstruire, et défendues par certain-e-s auteur-e-s ici.



Les auteur-e-s, Étienne Balibar, Frédéric Boccara, Thomas Coutrot, Alexis Cukier, Cedric Durand, Michel Husson, Pierre Khalfa, Sandro Mezzadra, Catherine Samary et Frieder Otto Wolf proposent donc différents points de vue et analyses qui se recoupent ou non, qui explicitent des divergences et des accords. Je me contenterais de souligner subjectivement certains points.



Alexis Cukier rend compte des problématiques négociations – mobilisations sociales – rapport de force. Il insiste sur un point qui me semble important, la neutralisation de l’expression de Syriza, du débat démocratique dans le « parti », par les membres du gouvernement appartenant à ce parti. L’absorption institutionnelle est toujours problématique et tend à réduire les débats et les possibles.



Si les analyses du caractère contraignant des traités européens est largement souligné, les autres traités internationaux sont souvent oubliés. Hors les uns et les autres visent à constitutionnaliser l’orde capitaliste néolibéral, « « la liberté » du néolibéralisme est une liberté essentiellement coercitive » (Étienne Balibar, Sandro Mezzadra et Frieder Otto Wolf)



Ces auteurs soulignent aussi les inégalités sociales et territoriales internes à chaque pays, parlent de l’espace méditerranéen, évoquent les possibles procédures représentatives et démocratiques dans l’espace européen, « sous la forme d’une création institutionnelle, instituant la représentation et la délibération aux échelons de pouvoir réel dont elle est complètement absente, et sous la forme d’une citoyenneté active, c’est-à-dire d’une mobilisation de masse de citoyens (qu’on pourrait appeler un « contre-populisme ») sur tous les sujets qui appellent une responsabilité transnationale (de la liberté de l’information à l’environnement, en passant par les droits des travailleurs, les mobilisations des migrants, précaires et chômeurs, et la lutte contre la corruption et l’évasion fiscale). » Hypothèse stratégique mais dont la déclinaison politique semble bien difficile, ils parlent de « favoriser un nouvel internationalisme intra-européen ».



Le titre de cette note est inspiré par une phrase de leur texte.



Catherine Samary souligne la question, qui me semble incontournable, de l’espace politique européen : « Construire l’espace politique européen dans/hors/contre l’Union européenne ». Elle revient sur la construction européenne, l’intégration des ex-pays de l’est, son histoire spécifique, les convergences d’intérêts entre les classes dominantes y compris grecques, les « conflits de classe » en Grèce qui ne sauraient se dissoudre dans une « alliance nationale » autour d’une monnaie. Je partage l’idée de « mutualiser et développer les actions transnationales » du travail syndical ou politico-associatif. Il me semble indispensable de proposer des espaces de socialisation et de mutualisation au moins aussi importants que ceux (mal) construits par le système capitaliste, de penser l’institutionnalisation de la solidarité hors du cadre des anciens Etats…



Cédric Durand me semble utiliser de nombreux arguments très réversibles, comme par exemple, lorsqu’il parle de « désynchronisation des rythmes nationaux de la lutte de classe ». Cela n’existe-t-il pas à l’intérieur de chaque pays ?, sans oublier que le « la » devrait être remplacé par un « les » plus adéquat pour rendre compte des réalités disparates territoriales (et pas seulement dans les états « pluri-nationaux ») ou sectorielles… Sa défense du tissu industriel « national », outre qu’il contourne la mondialisation et les chaines de valeur internationalisées, semble oublier qu’il s’agit bien d’organisation capitaliste industrielle. Plus surprenant encore me semble, les exemples donnés des industries grecque exportant des biens : les transports (les armateurs) dont la contribution à l’économie et aux ressources fiscales sont bien connues ! ou l’industrie touristique dont la soutenabilité sociale et écologique n’est pas abordée… Que dire de la comparaison des données économiques entre la Grèce, l’Argentine et la Russie ?



Comme Stathis Kouvelakis, dans le n° de Contretemps cité, Cédric Durand reproduit une phrase de Marx et Engels « Comme le prolétariat doit en premier lieu conquérir le pouvoir politique, s’ériger en classe nationale, se constituer lui-même en nation, il est encore par là national, quoique nullement au sens où l’entend la bourgeoisie », sans interroger le sens du mot « nation » au milieu de XIXème siècle. Je ne peux que reproduire des questions et des commentaires déjà écrits : Quel(s) sens pouvai(en)t avoir le mot « nation » ? Quels sont les rapports/recouvrements entre « nation » et futur « Etat nation » ? Quels rapports aujourd’hui entre « nation », « Etat », «État-nation » et « mondialisation capitaliste » ? A ne pas poser ces questions, l’auteur semble considérer que la « nation » est trans-historique et me semble sous-estimer les tensions/contradictions actuelles entre entre « nation » et « Etat-nation », ce qui est évidement plus que problématique…



Contre un choix binaire (euro ou non) Michel Husson souligne, entre autres, le raccourci éliminant « tous les éléments intermédiaires de construction du rapport de force », l’impasse sur « les rapports de classe interne à la société grecque », parle de la place de l’économie « de la Grèce » dans le système mondialisé, de fétichisation de la monnaie, des effets possibles des dévaluations et de la guerre de tou-te-s contre tou-te-s…



Thomas Coutrot et Pierre Khalfa soulignent la place des « responsables des Etats nationaux » dans la construction des politiques européennes, et reviennent en détail sur les choix antidémocratiques « adoptés par tous les gouvernements de la zone euro ». Contre les analyses unilatérales, ils mettent l’accent sur les contradictions. Je partage leurs analyses sur « desserrer l’étau financier », le rappel que des mesures possibles sont à la fois un geste politique et économique, la combinaison de négociations et d’affrontements, les mesures « unilatérales » ou le « processus de désobéissance aux traités et aux directives européennes » ; tout en rappelant que les avancées ne sont pas inscrites automatiquement dans les politiques choisies. Contre les visions trans-historiques de la notion de « peuple », ils se projettent aussi dans le futur : « Le « peuple » n’est pas une entité immuable tombée du ciel mais une construction historique liée aux combats communs »…



Ni les populations grecques ni nous-même n’avons de baguette magique, les possibles orientations stratégiques de rupture ne peuvent, sauf circonstances exceptionnelles (la paix, la terre, le pain), se résumer à un ou plusieurs mots d’ordre ou à une ou plusieurs idées. Nous pouvons nous appuyer sur des contractions internes aux différents arrangements et rapports sociaux, élaborer des hypothèses stratégiques, participer à des expériences… et poursuivre les débats pour comprendre quels sont les véritables enjeux derrière des divergences ou des argumentaires variés et participer ensemble aux mobilisations, reconstructions toujours encours, en gardant en tête à la fois la complexité du monde et le principe espérance…
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En finir avec la compétitivité : Le contre-rapp..

Pour déconstruire le mythe de la compétitivité résumée au coût direct du travail.



Publié en avril 2013 chez Syllepse, écrit par un groupe d'économistes rassemblé sous l'égide d'Attac et de la fondation Copernic, ce nouveau contre-rapport, visant donc explicitement le bréviaire de Louis Gallois commandé par le gouvernement socialiste (on entendra ou non des guillemets autour de ce dernier mot selon ses opinions) actuel, se concentre sur la véritable mythologie qui entoure ces dernières années la notion même de "compétitivité", et tout particulièrement sur la série de syllogismes, d'approximations et de mensonges qui conduisent à la fallacieuse équation "compétitivité = coût direct du travail".



Comme presque toujours pour les publications d'Attac et de la fondation Copernic, les démonstrations et les analyses sont conduites avec vigueur, en s'appuyant sur des chiffres précis, des séries historiques complètes et des comparaisons internationales rigoureuses, à la différence de nombre de pseudo-pensées colportées par la sphère économico-journalistique dominante.



Un nouveau travail salutaire qui, en 80 pages efficaces, mérite toute notre attention.

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Dépendance, perte d'autonomie : Affaire privée ..

Les auteur-e-s de ce petit ouvrage analysent les enjeux autour du débat sur la dépendance. Elles et ils se positionnent pour une reconnaissance du « droit universel de toute personne à voir sa perte d’autonomie prise en charge à 100% par la solidarité nationale dans le cadre de la Sécurité sociale, ce qui exclut le recours aux assurances privées et à la logique individuelle. »





Au delà de l’appréciation toujours délicate des éventuels besoins à horizon dix ou vingt ans, le coût des couvertures des besoins, exprimé en pourcentage du produit Intérieur Brut (PIB) ne serait que très faible, de l’ordre de 2,5 à 2,8 % du PIB contre 1,5 à 1,8% aujourd’hui.



A très juste titre, les auteur-e-s mettent aussi l’accent sur « L’estimation de l’aide informelle fournie par toutes ces personnes s’avère être supérieure à l’ensemble des dépenses publiques consacrées à l’aide formelle. » et soulignent que ce travail est souvent invisibilisé, comme les femmes qui en assurent la très grande part.



Au contraire, elles et ils opposent « la prise en charge des personnes dépendantes n’est pas une affaire privée, dans aucun sens du terme, c’est-à-dire qu’elle ne doit reposer ni sur la sphère privée, ni sur le recours à l’assurance privée » ou « affirmer politiquement un principe de base : le refus de se défausser sur les proches – plus concrètement sur un travail invisible majoritairement assumé par des femmes. »



Dans leur argumentation, les auteur-e-s nous rappellent aussi que « Les cotisations sociales sont une composante du salaire brut, et ne sont pas des impôts. »



Contre les politiques néolibérales et gouvernementales, il s’agit donc à la fois d’apporter des réponses solidaires entre générations et égalitaires entre les femmes et les hommes.
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