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Citation de cinquecento


- Signori, intervient avec douceur le Grand Chancelier De’ Franceschi en soulevant un feuillet, voici la lettre du Sénat, adressée au Provveditore da Mar , et commandant d’emprisonner le Sopracomito Da Canal dans la citadelle de Zante. Souhaitez-vous en entendre lecture ?
Sur l’approbation générale, l’homme aux beaux cheveux blancs psalmodie en sourdine les phrases forgées par Nicolò Cavazza, secrétaire du Sénat.
- Cette lettre est parfaite. Il nous reste, Signori, dit le respectable Badoer, à en écrire une autre, secretissima, qui ordonnera au Podestat de Zante de recevoir le médecin que nous lui enverrons pour prendre soin de son prisonnier.
- Le climat de Zante est favorable aux fièvres, approuve déjà le capo du Conseil des Dix.
- La seule chose possible est que ce médecin se mette en route sans tarder, muni d’un coffre contenant ses drogues et que, piano, piano, notre prisonnier perde la santé et se trouve en état de se présenter devant Dieu. Alors, ce médecin examinera le cadavre, comme pour voir de quel flux d’humeur il est mort. Il jettera ses drogues et s’emploiera à mettre dans le coffre la chose que nous réclame le Sultan.
- Nous n’avons pas le choix.
- Quelle pitié de perdre ainsi un homme de courage. Hélas ! Il s’est mis en travers de nos intérêts.
- Nous avons essayé de lui pardonner, mais c’est hélas impossible, n’est-ce pas ?
- Dunque, sommes-nous d’accord sur cette façon de sortir de la crise ?
Pour rien au monde, le Chancelier ne renoncerait au rite de faire lever les mains afin que chacun s’exprime clairement sur la proposition. Cinq mains solennelles se lèvent, le Chancelier, n’ayant pas droit au vote, compte du bout de sa plume, note, tout en prononçant, détachant bien les syllabes :
- De parte : 5, – De non : 0, – Non sincero : 0.
Le cérémonial accompli, les murmures reprennent :
- Perbene, ma… La famille réclamera le corps.
- Il sera mort de la peste ou de quelque fièvre inconnue qu’on ne peut introduire dans notre Cité. Des honneurs militaires lui seront rendus à Zante et il y sera enterré en pleine terre. Nous ferons une cérémonie civile à Venise dans la basilique de San Zanipolo.
- Ovviamente, ma… Qui ira en Perse, où se trouve actuellement le Sultan, pour lui apporter le coffret ?
- Pourquoi pas le même médecin ? Cela réduirait le nombre d’hommes qui seront dans le secret. Le Podestat de Zante pourra, sans savoir ce que cet homme transporte, lui donner une escorte et des interprètes suffisants pour se rendre jusque dans Bagdad ou dans quelque place où se trouvera alors le Grand Seigneur.
- Perfetto, ma… avons-nous ce médecin qui pourra agir de façon compétente, c’est-à-dire discretissime, secretissime ?
- Le Signor Fazzoli fera très bien l’affaire, dit le Grand Chancelier. Il a déjà exécuté pour nous bien des missions délicates.
- D’accordo, ma… cet homme, qui exécute l’ensemble de la mission est, de ce fait, en mesure de la comprendre. Pouvons-nous prendre le moindre risque d’une indiscrétion… qui peut parfois se trouver involontaire ? Et imaginez que le peuple ou la famille Da Canal sachent de quoi est réellement mort le Sopracomito. Il ne s’agit pas ici d’un individu quelconque, mais d’un patricien de l’une des plus grandes familles de Venise. Nous devons faire revenir le Signor Fazzoli par un autre chemin. Nous pourrions avoir, à Corfou par exemple, un homme qui ignorera tout de la mission secrète de ce médecin et le verra périr des fièvres sur la route du retour. Nous verserons, cela va sans dire, de belles pensions aux deux veuves qui résulteront de nos arrangements.
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