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Citation de isajulia


Mon père a très vite saisi que la providence m'avait désigne comme son successeur. Sans doute à cause de la vision que j'ai eue à cinq ou six ans, devant la cage de nos perruches. Je les regardais chanter sur leur perchoir quand une image s' est imposée dans mon esprit : elle montrait les deux oiseaux inertes, le bec ouvert. Un présage qui s' est confirmé dès le lendemain. La grande faucheuse m'avait ravi mes deux camarades. (...) Outre les consultations qu'il donnait à titre gracieux dans notre modeste cuisine, il travaillait à la préfecture. Comme moi aujourd'hui, il avait une double vie, secrétaire le jour et voyant les soirs et les week-ends. Seulement, mon père n'a jamais réussi à bien compartimenter les deux. Les visions ne surviennent pas sur commande. Elles peuvent se manifester à des moments incongrus et porter sur des proches comme sur des parfaits inconnus. Je me rappelle la fois où nous étions sortis ensemble faire quelques courses. Je devais avoir un peu plus de dix ans. Dans la rue qui longeait le cimetière, on avait croisé Mme Bono. Elle revenait justement de la tombe de son mari. Ses mains étaient couvertes de terre et ses joues trempées de larmes. En la voyant, mon père s' était arrêté net pour l'interpeller ainsi :
- Bonjour, madame Bono. Mais... vous pleurez? Je ne vois vraiment pas pourquoi. Votre mari est tellement mieux là où il est.
Et la pauvre dame avait détalé en sanglotant de plus belle.
Mon père n'a jamais su se retenir. Dès qu'une image lui passait par là tête, il avait besoin de mettre des mots dessus. À croire qu'elle lui brûlait le cerveau.
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