"[•••] Le commencement de la manière noire consiste en la préparation du cuivre vierge : il faut le bercer. Par ce travail ingrat débute l'état de folie qui va envahir et diriger la réalisation de la gravure jusqu'à l'état final... fatigue, lassitude du geste répété mille fois, nécessaire pour que l'image habite le cuivre avant même d'être véritablement conçue. Elle est là, présente et invisible lorsque le noir absolu, profond, intense est enfin obtenu. Puis la récompense, avec le brunissoir : le dessin, caresses après caresses appuyées, avec justesse et précision, recommencées sans cesse pour polir le cuivre et doucement faire monter les gris, les blancs, donner formes et volumes, apprivoiser la lumière, essayer d'ébranler les frontières entre le contour et l'indéfini, entre le vide et le plein. Ivresse du danger, vertige de l'erreur, de détruire ce qui fut si long à faire naître..., la manière noire exige une force de concentration qui dévient respiration et cela de façon si obsédante que j'ai eu parfois envie de griffer cette matière superbe, de rayer ce noir si velouté." (p. 47)
Donatella. T
La manière noire de Donatella. T