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Citation de Partemps


Georges Bataille


Rêve

Dans la rue devant la maison que nous habitions à Reims. Je pars en bicyclette. rue pavée et rails de tramways. très embêtant pour la bicyclette. rue pavée on ne sait où aller à droite ou à gauche. multiplication des rails de tramways. Je frôle un tramway mais il n'y a pas d'accident. Je voudrais arriver à l'endroit où après un tournant il y a une route lisse mais désormais il est sans doute trop tard et l'admirable route lisse sur laquelle on va puis redescend avec la vitesse acquise [est] maintenant pavée. En effet lorsque je tourne la route n'est plus comme autrefois on la refait mais pour la refaire on l'a transformée en une immense tranchée de laquelle sortent de très forts _|¯|_ (1). J'aperçois ces forts soutiens mais de plus en plus je les vois sous formes précaires d'abord qu'ils sont formés avec des carcasses de tonneau aux bois disjoints dans des cercles qu'il faudra remplir de terre puis de plus en plus les tonneaux disjoints à ériger (2). On procède comme il suit des ouvriers cavistes extrêmement virils et brutaux et même [affreux noirs] arrivent pour dresser le long et mince tonneau branlant. À ce moment une nuit atroce se fait : je circule sous la forme d'un gentleman américain. Il est nécessaire pour ériger le tonneau de tirer sur de grosses cordes noires de suie auxquelles on suspend des animaux tels que d'énormes rats atroces par la queue mais qui menacent de mordre, mais il faut les tuer. Les ouvriers cavistes sont avec un grand plaisir en contact avec ces immondices qu'ils accrochent avec joie mais le visiteur américain au complet risque de se tacher et d'être mordu et il n'est pas peu dégoûté et même effrayé. Cependant il se maintient avec peine les poissons visqueux et sanglants ou rats morts mais menaçants à hauteur de sa figure.
L'association s'est faite ainsi.
Horribles rats et toutes mes terreurs de l'enfance. La cave où l'on descend avec une chandelle.
Terreur des araignées.
Et puis tout à coup je me souviens d'être descendu à la cave avec mon père, une chandelle à la main. Rêve de l'ours avec un chandelier.
Les terreurs de l'enfance araignées etc. liées au souvenir d'être déculotté sur les genoux de mon père.
Sorte d'ambivalence entre le plus horrible et le plus magnifique.

Je le vois avec un sourire fielleux et aveugle étendre des mains obscènes sur moi. Ce souvenir me paraît le plus terrible de tous. Un jour où à un retour de vacances je le retrouve me manifestant la même affection.

À mon réveil j'associe l'horreur des rats au souvenir de mon père me flanquant une correction sous la forme d'un crapaud sanglant dans lequel un vautour (mon père) plonge le bec. J'ai les fesses nues et le ventre en sang. Souvenir très aveuglant comme le soleil vu à travers les yeux fermés en rouge. Mon père lui-même, j'imagine qu'aveugle, il voie aussi le soleil en rouge aveuglant. Parallèlement à ce souvenir mon père assis.

Ça me fait l'effet de me rappeler que mon père étant jeune aurait voulu se livrer à quelque chose sur moi d'atroce avec plaisir.

J'ai comme trois ans les jambes nues sur les genoux de mon père et le sexe en sang comme du soleil.

Ceci pour jouer au cerceau.
Mon père me gifle et je vois le soleil.
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