Je partis sur un transport de troupes et suivis les cours d'officiers qui s'empressaient de nous endurcir un nous bourrant d'histoires sur les atrocités allemandes. J'en déduisis que ces Allemands étaient de véritables monstres ; ils ne gagnaient pas de campagnes, mais ils mutilaient les enfants, violaient les femmes (jamais moins de dix fois pour une seule victime) et insultaient la religion - voilà ce qui les incitait à faire la guerre. Ils prenaient le ton de leur Kaiser, un monstre comique et dément ; il fallait leur montrer que la décence existait encore dans le monde, et nous incarnions cette décence. J'avais alors suffisamment goûté à la vie militaire pour savoir que, si c'était le cas, les Allemands devaient être de vraies brutes, car on pouvait difficilement imaginer une bande d'endurcis plus grossiers, plus voleurs et plus débauchés que certains de nos propres soldats.