Rolande Michel

J’avais beaucoup apprécié la plume de Rolande Michel en lisant son roman jeunesse Jeanne (éditions Chloé des Lys, 2013). C’est donc avec le plus grand intérêt que je me suis penché sur son second opus au titre énigmatique : Le boiteux de Grattebourg. Voilà de quoi éveiller ma curiosité ! Amateur de géographie, je me demande tout d’abord où peut bien se situer ce mystérieux village... Eh bien, on le trouve dans un espace temps particulier, pas si lointain, mais pas si proche non plus, qui est celui des contes et de l’imaginaire. Est-ce à dire que l’on va déambuler dans un univers purement onirique ? Non. Car les personnages dépeints par Rolande Michel sont bien « vivants ». Nous aurions pu croiser chacun d’eux dans une de ces campagnes où le temps semble s’être arrêté et où des paysans surgis d’un passé pas si lointain forment une petite communauté où tout le monde se connaît, et où celui qui vient du village voisin ne sera jamais quelqu’un d’autre que l’« étranger ». L’auteure croque ainsi de manière savoureuse ces gens simples, pour qui le surnaturel et la rumeur font partie du quotidien. Un chat noir va notamment stigmatiser les angoisses de tout le village : il ne peut être que l’envoyé du diable...



Au milieu de tout cela, au cœur même de cette histoire, il y a Anselme, le boiteux, rejeté et incompris par tous... ou presque ! Le mystère plane sur ses origines. Par ailleurs, Anselme est différent, et cela ne concerne pas seulement son apparence physique : un étrange bruit de charrette le prévient de la mort imminente des gens, ses mains disposent du pouvoir de guérir... Autour de lui, il trouve heureusement quelques soutiens, d’autres personnes à la marge, comme lui, attachants, comme lui : il y a Joseph, le rebouteux, qui soigne grâce au magnétisme et à sa connaissance des plantes. Il fera d’Anselme son élève. Il y a aussi Maria, la cartomancienne. Et puis il y a Sainte Marie, mère des abandonnés, vénérée par le boiteux telle une figure maternelle qu’il n’a jamais connue...



À la fois conte fantastique (Quel est ce chat noir qui terrorise le village ? Le château du vieux comte est-il vraiment abandonné ?), roman initiatique, quête des origines, ce court récit est riche et fort agréablement écrit. La fin, pour le moins énigmatique, laisse planer beaucoup de doutes, et de nombreuses questions demeurent en suspens. Aura-t-on droit dans un futur plus ou moins proche à une nouvelle incursion dans le village de Grattebourg ? Je l’espère en tout cas !

J'ai d'abord été intrigué par cette couverture énigmatique où l'on découvre un hippocampe semblant s'échapper d'un miroir, puis par le titre simple et sobre, Jeanne, du prénom de l'héroïne du roman. Il n'en fallait pas plus pour me donner envie de plonger dans ce récit de littérature de jeunesse écrit par Rolande Michel. Et plonger est bien le mot, dans tous les sens du terme !



Dès les premières pages, Jeanne nous fait partager ses pensées, ses rires, ses peines, ses bêtises et ses rêves. J'ai dévoré ce livre ! J'ai beaucoup aimé faire connaissance avec cette petite fille coquine et pas toujours très sage qui m'a entraîné peu à peu dans son monde, un monde où il est possible de voyager sous les océans ou à travers le temps, un monde où l'amitié est une valeur plus forte que le fait de plaire au plus grand monde, y compris au sein de sa propre famille, un monde où l'on peut donner un nom aux arbres et avoir pour compagnons la famille Cromagnon, un monde où l'on peut parler aux oiseaux ou à une goutte d'eau, bref, un monde que les adultes peuvent avoir du mal à comprendre mais qui ravira certainement les jeunes lecteurs ainsi que les grands qui ont su garder au fond d'eux une étincelle de leur âme d'enfant.
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