Citations de S. K. Tremayne (142)
J'ignore si Electra a réellement prononcé ces mots ou si le silence de l'appartement, associé à l'alcool et à mon sentiment aigu de solitude, m'a poussée à imaginer ces accusations, mais je suis profondément ébranlée.
- Electra ? Quelle heure est-il ?
- Il est 22h52.
Elle s'est remise à fonctionner normalement. Moi, en revanche, j'ai du mal à faire comme si de rien n'était. Je vais essayer. Essayer d'être normale et d'oublier ce moment de folie, cette espèce d'hallucination auditive, de cauchemar éveillé. C'est peut-être un simple bug. Après tout, les voyants ont clignoté bizarrement juste avant ma promenade. Mais comment un dysfonctionnement pourrait-il expliquer les paroles d'Electra ?
La plupart se sont mariés, ont eu des enfants, et ont décidé de quitter Londres pour aller s’installer dans des endroits avec jardin. C’est ce que font les trentenaires en général, évidemment, sauf quand ils sont riches et déjà propriétaires comme Tabitha. Si habiter à Londres à 20 ans tient du défi, aussi difficile qu’excitant, y mener une vie de famille à 30 relève quasi de l’impossible.
La tristesse me gagne, née des souvenirs et de la culpabilité. Ce site me pose trop de questions. Que va-t-il me demander maintenant ? « Quels sont vos sentiments à l’égard de votre père ? »
Je connais des femmes – et des hommes – de ma génération qui ont commencé à se rajeunir de quelques années sur Tinder, Grindr ou PantsonFire. Pour ma part, je n’en éprouve pas le besoin. J’ai 33 ans, bientôt 34, et ça me convient. Même si je ne suis plus de première fraîcheur, je ne m’estime pas encore périmée. Il m’arrive toujours de sentir dans la rue le regard appuyé d’un mâle se retournant à mon passage.
En fait, je m’appelle Josephine, mais j’ai opté pour ce diminutif quand j’étais adolescente parce que ça me paraissait plus cool, et je m’y suis tenue par la suite. Risque-t-on de me prendre pour un homme ? Tant pis
Aujourd’hui, l’argent s’investit dans le cinéma et la télé, certainement pas dans la presse écrite. J’ai récemment estimé qu’il me restait 600 livres d’économies, sur un compte épargne. J’ai souvent entendu dire qu’on pouvait se retrouver à la rue après seulement deux mois sans revenus. Autrement dit, si la banque finissait par se lasser de mon découvert, je serais vite condamnée à errer dehors dans le froid. Je dévore donc les guides d’écriture de scénarios, dont ceux d’experts tels que Syd Field ou Robert McKee, pour me familiariser avec les tournants dramatiques, les accroches, les cliffhangers et les structures classiques en trois actes. Jusque-là cependant, malgré tous mes efforts, mes récits censés être pleins de suspense et de tension dramatique ont toujours singulièrement manqué de suspense et de tension dramatique. Je ne me décourage pas pour autant. De toute façon, ai-je le choix ?
L’ironie de la chose, c’est que Tabitha utilise rarement ces merveilles technologiques, de même qu’elle ne boit pas souvent son lait de noisette bio ou ses smoothies à la spiruline : elle n’est pratiquement jamais là. Soit elle part à l’étranger pour produire un de ses documentaires télévisés sur la faune et la flore soit elle va passer la nuit chez son fiancé, Arlo, à Highgate.
Tout chez Tabitha est si élégant et raffiné que je la menace parfois d’acheter une pendule en plastique kitsch, comme on en trouve au supermarché discount de Parkway, pour « égayer un peu l’atmosphère ». Puis j’attends, impassible, qu’elle visualise la scène, et nous éclatons de rire. J’adore vivre avec Tabitha. Il n’y a sans doute qu’avec les vieux amis qu’on peut se permettre ce genre d’humour… ou avec le partenaire idéal.
Contrairement à elle, je resterai locataire, à moins qu’une vague de crimes à l’arme blanche ne fasse chuter les prix dans cette ville. Et je ne vois pas trop comment ma situation pourrait changer à court terme : je suis journaliste freelance. J’ai choisi de m’établir à mon compte quand l’expression « freelance » est devenue une sorte de mauvaise blague : « free » comme « libre », certes, mais aussi comme « gratuit ». Vu les tarifs dérisoires pratiqués dans la profession, l’écriture s’apparente plutôt à une forme d’esclavage.
À 33 ans, je me retrouve célibataire, sans enfants et sans domicile fixe. OK, j’habite un bel appartement dans la partie la plus résidentielle de Camden, North London, quartier qui marque la frontière avec la véritable opulence georgienne de Primrose Hill. Mais c’est uniquement grâce à Tabitha, mon amie fortunée, qui a eu pitié de sa vieille copine de fac fauchée et récemment divorcée. « Pourquoi ne pas t’installer dans la chambre d’amis ? Elle ne sert pas tant que ça… »
Je me dis que, en un sens, ces gadgets sont un peu comme des animaux domestiques, en moins exigeants et moins contraignants, qui font des choses agréables et utiles. Des chiens qu'on n'aurait pas besoin de sortir mais qui vont chercher l'équivalent des balles de tennis, des pantoufles ou des "journaux"...
Un site de rencontre pourra-t-il me guider, telle une marraine de conte de fées version numérique brandissant une baguette d'algorithmes étincelants, vers un nouveau compagnon ?
...je suis journaliste freelance. J'ai choisi de m'établir à mon compte quand l'expression "freelance" est devenue une sorte de mauvaise blague : "free" comme "libre", certes, mais aussi comme "gratuit". Vu les tarifs dérisoires pratiqués dans la profession, l'écriture s'apparente plutôt à une forme d'esclavage.
Quand on est assis dans un avion qui s'écrase, on a beau attacher sa ceinture, ça sert a rien
La confusion de ses sentiments était pareille à un feu humide sur la lande, dégageant plus de fumée que de chaleur, qui menaçait de l'étouffer, anéantissait l'espoir, consumait tout.
Les nuages gris au-dessus de ma tête m'évoquent toujours un couvercle de cercueil, mais devant moi, plus près de la côte, le soleil brille, illuminant le patchwork doré des champs, les doux reliefs des basses terres.
Si seulement il en allait de même pour l'amour, songea-t-il en s'engageant de nouveau sur la route des macchabées. Si seulement on pouvait le réparer, le rétablir, le restaurer...Mais quand la confiance n'existait plus dans un couple, dans une famille, que devenait-on ? Quand les relations se teintaient de défiance, voire de mépris, où est-ce que ça menait ? Vers quelles sombres contrées ?
Tout en roulant, j’aperçois le long de la route des corneilles perchées sur les poteaux téléphoniques, qui m’observent.Silhouettes noires. Yeux noirs .
Parfois je m'aperçois, pinceau à la main, flacon de white-spirit à mes pieds, que j'ai passé vingt minutes à regarder le soleil illuminer les montagnes fauves et faire briller les roches sombres, ou les nuages blancs dériver lentement au-dessus des montagnes enneigées de Knoydart : Sgurr nan Eugallt, Sgurr a'Choire-Bheithe, Fraoch Bheinn.
Je suis terrifiée par mes deux filles, les deux fantômes de cette maison, les deux fantômes dans ma tête - les Jumelles de Glace, indissociables l'une de l'autre.