Sam Szafran. Ni Dieu ni maître.
Troisième entretien
Des escaliers sans fin ([27 décembre 2009]
Subitement, je trouvais que, comme pour Alberto [Giacometti ], comme auparavant pour Cézanne, comme peu après pour Picasso, le rôle de l'artiste, c'était de donner un autre regard, un regard qui permette de voir autrement. (p. 65) [Entretiens de Sam Szafran / avec Alain Veinstein, Flammarion, 2013 ]
Portrait sans pose
"La faucheuse a été dure avec moi ces derniers temps..." Et d'évoquer ses amis disparus: il avait perdu son grand ami Henri Cartier-Bresson en 2004 (...) Chaque fois, pour lui qui a fait sa vie d'une mort différée, c'est la même stupeur. Chaque fois, la mort détruit l'harmonie. Elle vient rompre le fil sur lequel, tant bien que mal, avec l'aide de la peinture, il a tenté de se tenir en équilibre. (p. 23)
Deuxième entretien ---La Peinture ou la Pègre --- 26 novembre 2009
S.S.- La rue, totalement ! Je suis un gosse des rues. La rue aura été le seul endroit où j'aurai été tranquille. (p. 49)
Portrait sans pose
Par des volées de marches, on repasse toujours au même point, mais jamais au même étage. (...) L'escalier visible dans l'atelier est privé de fonction, réduit à sa forme. Il ne mène nulle part. Il est l'appel du vide, le haut lieu du vertige. Une tragédie à lui tout seul. (p. 19)
Portrait sans pose
Celui qui refuse tous les interviews, qui vit la passion de la fureur, l'obsession de la désobéissance, de la non-conformité et se tient reclus dans son atelier n'est pas un être de peu de paroles. Il sait précisément ce qu'il veut dire et où il souhaite aller. La radio me l'a appris: celui qui a une réputation de mutique peut se révéler intarissable, à charge, pour l'intervieweur; de trouver sa place, la juste distance, qui va faire reculer, peu à peu, la défiance. (p. 16)
Si j'avais les moyens, je ne finirais rien. Rien. Parce que je considère que l'infini est plus intéressant que le fini.(p. 72)
Portrait sans pose
Toute la maison d'ailleurs, à l'image de l'atelier envahi par les plantes, m'apparaît comme un conservatoire d'objets de toutes sortes accumulés au fil du temps et qui affirmeraient leur sympathie pour le parti du chaos. La maison ne se contente pas d'être un lieu de vie, elle est un atelier, un jardin et, en quelque sorte, un cabinet de curiosités. (p. 14)