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Critiques de Sarah Helm (10)
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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

l y a quelques années j'avais lu Si c'est un homme de Primo Levi. Mon fils l'avait étudié en cours. Ce livre autobiographique m'avait remué aussi, tout comme lui. Les années ont passé et pourtant tout est dit et plus que dit, alors que rechercher dans ce documentaire? Enfin je pensais en apprendre un peu plus sur la conditions des femmes , si ce n'est qu'au fil des pages je me suis aperçue que je ne savais finalement bien peu de choses , voire pratiquement rien ! Et se plonger dans cette lecture c'est pour moi quelque part rendre hommage à ces oubliées. Ici à travers ce documentaire l'auteur veut mettre en avant que la machine de destruction infernale ne touchait pas que les Juifs mais toute personne jugée impure, tziganes, témoins de Jéhovah , handicapées, résistantes .. toutes nationalités confondues y compris les Allemandes pour diverses raisons .Elle lève le voile sur un pan de l'histoire de ce camp et de toutes ses femmes,et ce n'est pas le nombre qui compte , mais plutôt qui elles sont, mettant en avant ces anonymes en les nommant , leur rendant vie . Que Ravensbruck soit enfin reconnu comme un camp de la mort au même titre que les autres.

Une enquête particulièrement bien ficelée, sur les conditions de vie des femmes dans ce camp, l’auteure donne voix à ces héroïnes inconnues. Elle rend compte avec justesse, et sans excès, de la terreur quotidienne et des ­effroyables tortures infligées aux détenues. Mais, aussi, de la solidarité et du courage dont elles firent preuve.

La vie du camp y est disséquée, l'auteure nous fait suivre , gardiens, prisonnières, collaboratrices, mouchardes et résistantes. Nous suivons leur histoire mais aussi les évènements parallèles, l'évolution de la guerre, les actions d'aide de la Croix Rouge quand celle ci se manifeste enfin jusqu'à l’épilogue jusqu'au procès de Nuremberg , et même jusqu'à aujourd'hui C'est émouvant, douloureux.

Un constat sur la nature humaine à la fois effrayante avec toutefois une note d'espoir, devant la solidarité entre ses femmes et leur volonté inébranlable de croire, esperer, survivre, rendre compte, se battre à leur manière avec leur pauvres moyens. et surtout résister Des témoignages qui nous font nous questionner sur nous même, que serions nous demain dans de telles circonstances ? Mon âme,mes convictions, mes valeurs humaines seraient elles brisées par la machine infernale? Accepterais-je de fermer les yeux, ne ne pas tendre la main de crainte d'en subir les conséquences, jusqu'à degré de résistance physique et psychologique pourrais je aller ? Deviendrais-je lâche ? Vendrais-je mon âme pour un morceau de pain ? Deviendrais-je un monstre ? Ou au contraire le meilleur de moi même serait transcendé ?

Ce témoignage est bouleversant devant la cruauté de certaines femmes, parce qu'on a beau dire devant les atrocités commises par les hommes, qu'une femme ne ferait jamais de telles choses et pourtant ... Idées préconçues de fait, les monstres sont partout, on le voit bien aujourd’hui le pouvoir sur les autres ouvre la porte à bien des horreurs, les enfants eux même que l'on considère comme des êtres innocents et purs se rendent parfois coupables d'horreurs sans nom.

Ce documentaire ne peut se lire que sur un temps assez long, d'abord parce que c'est terrible, et que c'est un pavé , tellement il est riche d’événements renvoyant à de nombreuses références historiques. De plus il frappe bien plus fort , oui parce que je suis une femme donc forcement, c'est une lecture viscérale qui vous tord le ventre quand vous ne pleurez pas.

Une lecture donc particulièrement éprouvante qu'il faut alterner avec quelque chose de plus léger, après tout il n'y a pas d'intrigue donc on ne craint pas d'en perdre le fil. Certaines âmes sensibles auront peut-être du mal à en venir à bout Je remercie Netgalley et les Éditions Calmann-Levy pour m'avoir permis (une fois de plus) de faire cette magnifique enrichissante lecture , douloureuse certes, mais combien riche de sens en faisant revivre certaines de ces détenues. Un livre mémoire qui leur rend un magnifique et vibrant hommage Bravo à l'auteure à son travail d'investigation qui a du être incroyable car retrouver des femmes si longtemps après ne devait pas être simple , d'autant que certaines suite à ces épreuves les avaient enfouies profondemment en elles ,au point de parfois de refuser d'évoquer ses souvenirs du camp.

Un livre fort, terriblement poignant,qui vous remue aux tripes et qui n'est que le témoignage de la brutalité humaine,de la méchanceté , de la soif de pouvoir et de profit et de suffisance au point de se croire d'une race de Seigneur.Mais c'est aussi une leçon de vie et d'espoir et de d'une capacité de résistance aux tortures physiques et psychologiques Un livre écrit pour ne jamais oublier
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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

« De l’aéroport de Tegel de Berlin, il faut juste une heure pour rejoindre Ravensbrück …/… »



Ainsi commence la ‘biographie’ de Ravensbrück, sous la plume de Sarah Helm.



Ce début m’a de suite interpelé, connaissant bien cet aéroport pour y avoir embarqué et ayant logé juste à côté durant un an au début des années ’80. Et pourtant je ne connaissais pas l’existence de ce camp.



Sarah Helm est journaliste britannique, également auteure de "Vera Atkins, une femme de l’ombre » livre sur la Résistance anglaise en France.



Ce camp de concentration, peu connu, était tout d’abord une prison pour femmes, ouverte peu de temps avant la guerre. Y étaient détenues principalement les opposantes à Hitler et les Témoins de Jéhovah. Au cours de la guerre il est devenu un camp de concentration pour femmes avec son lot d’atrocités (tortures, gazages, expériences médicales etc…) L’horreur à l’état pur.



Dans ce livre de 1200 pages Sarah Helm raconte comment ces femmes bien courageuses ont tenté de survivre. Elle a recherché les rescapées à travers le monde, a tenté de les faire parler. Souvenirs bien douloureux.



Je ne sais pas comment certaines ont réussi à ne pas perdre pied dans ce lieu pire que l’enfer. Cet ouvrage vous retourne les tripes. Comment ont-elles fait pour reprendre une vie ‘normale’ après Ravensbrück ?…



« Si c’est une femme » est l’équivalent de « Si c’est un homme » de Primo Levi.



Je ne saurai en dire davantage sur cet ouvrage tant j’en sors épuisé, vidé, essoré. De telles horreurs n’auraient jamais dû avoir existé. Quel regard sur l’espèce humaine ?



En a-t-on tiré des leçons ? Quand je vois ce qui se passe actuellement dans le monde je me pose la question.





Ce genre de livres est pourtant essentiellement écrit POUR NE PAS OUBLIER !

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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

Il a existé un camp uniquement construit pour les femmes : les droits communes, les asociales (mendiantes, prostituées, lesbiennes...), les résistantes des pays occupés, les déplacées de guerre des pays conquis... Et ne pensez pas que les conditions de vie étaient meilleures que des les camps réservés aux hommes ou mixtes. Que nenni, c'était tout pareil. Les gardiennes étaient tout aussi cruelles que les gardiens.

C'est une enquête dense, documentée, pour laquelle l'auteur a parcouru les archives, les minutes des procès, les continent européen pour rencontrer les survivantes et les geôlier.ères quand ils.elle étaient encore vivant.es. Autant dire que c'est un pavé, bien que les archives nazies aient quasi disparu ; mais ils restent celles des familles, des pays occupés (ou pas. La Russie et les Etats-Unis en possèdent également), de la Croix-Rouge... Bref, y a de quoi faire. Je ne suis évidemment pas une experte, mais j'ai l'impression que c'est très complet.

J'émettrai tout de même une ou deux réserves. C'est dense, mais ce n'est pas le problème : c'est parfois désorganisé et redondant. Ça rend la lecture parfois fastidieuse. Et peut-être, mais j'imagine que c'est lié au manque de témoins vivants ou connus, que parfois il y a un petit manque de recul ou de paroles contradictoires sur certains témoignages (sans que je remette en doute leur véracité). Mais ce sont vraiment les seules que je trouve à redire.

C'est une enquête passionnante et indispensable sur le sujet des camps de concentration.
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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

Livre très intéressant et complet MAIS attention, très difficile à lire dans l'émotionnel. Ne pas mettre entre toutes les mains. Je recommande à tous les "passionnés" de la seconde guerre mondiale.
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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

Vous qui vivez en toute quiétude

Bien au chaud dans vos maisons,

Vous qui trouvez le soir en rentrant

La table mise et des visages amis,

Considérez si c’est un homme

Que celui qui peine dans la boue,

Qui ne connaît pas de repos,

Qui se bat pour un quignon de pain,

Qui meurt pour un oui pour un non.

Considérez si c’est une femme

Que celle qui a perdu son nom et ses cheveux

Et jusqu’à la force de se souvenir,

Les yeux vides et le sein froid

Comme une grenouille en hiver.

N’oubliez pas que cela fut,

Non, ne l’oubliez pas :

Gravez ces mots dans votre cœur.

Pensez-y chez vous, dans la rue,

En vous couchant, en vous levant ;

Répétez-les à vos enfants.

Ou que votre maison s’écroule,

Que la maladie vous accable,

Que vos enfants se détournent de vous.



Turin, janvier 1947, Primo Levi



Je reprends le texte de Primo Levi dont l’auteure a placé un extrait en entrée de son livre.



« Ravensbrück était le seul camp nazi construit pour les femmes ». Aujourd’hui, un camp « hors de vue », des crimes mis en oubli et le courage des victimes largement ignoré…



Ravensbrück, l’empire SS de Himmler, 15000 camps nazis, les tueries et les exterminations, le « travail servile », un camp de la mort, un site d’« extermination lente » (Germaine Tillon).



Des témoignages, les voix des prisonnières elle-mêmes… « Je comprenais maintenant ce que le livre devait être : une biographie de Ravensbrück commençant par le commencement pour finir par la fin, où je ferais mon possible pour redonner sa cohérence à une histoire brisée. Le livre s’efforcerait d’éclairer les crimes des nazis contre les femmes tout en montrant en quoi la compréhension du sort réservé aux femmes est de nature à éclairer l’histoire plus générale du nazisme ».



Je ne vais pas rendre compte des lignes principales de cet ouvrage. Juste en parcourir quelques dimensions, souligner subjectivement tel ou tel point, essayer de nommer ce que certain-e-s conçoivent comme innommable. Des femmes de multiples pays, des récits et des témoignages loin des stéréotypes des victimes et des bourreaux. Un livre touffu où les anecdotes jouxtent les analyses, où des femmes sont criminelles et d’autres militantes et résistantes…



Les femmes et les années 20 en Allemagne, la toxicité du langage nazi envers les femmes dans les années 30, la volonté de séparer les femmes des hommes et de leur faire jouer un rôle d’ornement et de porteuses d’enfants…



Internement des femmes Témoins de Jéhovah, des asociales dont des prostituées, des malades mentaux, des lesbiennes, des dégénérées, des tziganes, des juives, la « vermine slave », les communistes… Purifier « le patrimoine génétique allemand », éradiquer les oppositions…



Camp de concentration. « La routine SS bien réglée avait rempli son office : produire un maximum de terreur à l’arrivée ». Le Revier, les blocks et les blockovas, « précisément parce qu’elles étaient là et qu’elles ont joué un rôle, elles ne pouvaient que s’arranger avec la vérité », le système des Kapos au cœur du projet des camps de concentration, la cooptation des droits communs pour diriger les politiques…



L’élimination des handicapé-e-s physiques et mentaux, le programme d’euthanasie T4, la couverture de la guerre pour masquer le caractère criminel, les expérimentations « médicales »…



Des allemandes, celles (et ceux) allemand-e-s, ancien-ne-s communistes libéré-e-s par Staline du Goulag pour être livré-e-s à Hitler…



L’éviction par les « politiques » des triangles verts et noirs des postes de Kapo…



Camp de concentration et hôpital, logiques bureaucratiques, avortements et stérilisations forcés, programme 14f13, exécution par balle, gazage, crématorium… Gazage local et secret comme priorité absolu… Ailleurs, Auxchwitz, extermination et travail servile…



Contestation et refus des témoins de Jéhovah, la logique et ses règles et les règles qui n’en ont pas, les liens entre les camps et les communautés locales, l’utilisation de la main d’oeuvre servile des camps de concentration, les bordels dans les camps d’hommes, les expérimentations et les « lapins », les expérimentations « spéciales » et l’injection de bactéries, « Les récits des lapins ne décrivent pas seulement la boucherie qu’elles ont subie mais éclairent aussi les autres atrocités commises au Revier dans la même période, notamment l’habitude prise par les médecins du camp de faire des injections létales », les tabassages, la nudité, le froid, la faim…



La main d’oeuvre concentrationnaire pour les industriels allemands et les nouveaux camps satellites, « Comme pour Siemens, le coût de location de la main d’oeuvre servile dans les camps satellites était soigneusement calculé entre les industriels et les SS. La différence était que, les satellites étant éloignés du camp principal, les entreprises pourvoyaient à l’hébergement et à la nourriture, dont le coût était déduit du montant facturé. » Aptes au travail et bouches inutiles, les résistances de tous les jours, le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) et la « solution finale », Nacht und Nebel…



.



Les 27000, tenir, la surpopulation concentrationnaire… Ailleurs, Paris, Varsovie, l’avancée des troupes et les viols commis par les soldats de l’Armée rouge, les situations « différenciées » par nationalité, le non bombardement des voies menant à Auschwitz et des chambres à gaz, la marche de la mort de janvier 1945, les libérations conditionnées pour certaines et les bus blancs, le front se rapproche, le premier camp libéré à l’ouest et la saisie des « horribles détails », les gazages réduits et le nettoyage accéléré… La libération.



Les destructions des preuves de ce qui avait eu lieu, les réécritures anti-fascistes en RDA, les rescapées soviétiques retournant dans leur patrie et considérées comme des traitres et certaines de « collaboration avec l’ennemi »…



En épilogue, Sarah Helm parle, entre autres, du nulle part où aller de survivantes, de la faible dénazification, des industriels allemands qui s’en tirèrent le mieux, des rescapées s’apercevant que « personne ne voulait entendre parler du camp », de la France s’accommodant de la collaboration et du peu d’échos des récits de résistant-e-s et de rescapé-e-s des camps, de la campagne de Staline contre les « cosmopolites », du silence en RDA sur les Tsiganes, asociales et Juives, des faibles condamnations et « des peines pitoyables » en RFA…



Le nazisme, « L’existence de Ravensbrück, qui couvre toutes les années de guerre, est un prisme utile pour observer l’évolution de ces objectifs ».



J’ai volontairement omis de citer des noms. Difficile de lire, de revenir sur ce passé, mais cela reste toujours nécessaire. « Ce ne fut pas une atrocité marginale. C’est là que l’horreur nazie s’arrêta, par un massacre de femmes de la façon la plus bestiale, sans couverture idéologique, si obscène fût-elle, sans raison ».



Justice n’a pas été rendue. « La nature et l’ampleur mêmes des atrocités commises ici envers les femmes étaient sans précédent ».



Je garde en mémoire ce tatouage sur ton bras alors que ton visage s’est depuis longtemps effacé.


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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

Le titre de cet ouvrage est un clin d'œil à un autre livre important, essentiel même, sur les survivants de la Soah et pour le souvenir : celui de Primo Levi, "Si c'est un Homme".



Entre 30 000 et 90 000 femmes périrent dans le camp de Ravensbrück (chiffre imprécis car trop de documents ont été détruits par les nazis pour que l'on sache vraiment, mais dans tous les cas, c'est juste horrible !). Moins connu que d'autres camps pour d'autres raisons historiques que l'auteur nous donne avec précision et simplicité, on plonge via cet ouvrage dans un univers que l'on voudrait fictif, mais hélas, il en est tout autrement. Les survivantes racontent... Et ce ne fut pas facile car le temps fut un ennemi non moins terrible, sans compter l'omerta qui était particulièrement tenace.



Ce livre est une biographie de Ravensbrück. L'auteur n'a pas personnifié le camp, c'est le camp lui-même qui est une entité. Le camp a eu une naissance, une existence et une fin.

Aujourd'hui, il reste le souvenir à travers les témoignages, les faits, les réalités.



Cet ouvrage pèse son poids tant par le nombre de pages que par son contenu qui est sidérant. Encore une fois, on voudrait que ce ne soit que le fruit d'une imagination particulièrement torturée, mais non.

La force de l'auteur est d'avoir pu rendre au mieux et de manière organisée toute la matière première qu'elle a pu glaner. Ce n'est pas indigeste au niveau du style. Ce qui peut l'être, ce sont les faits commis dans le camp de Ravensbrück.



A noter pour les étudiants et/ou les passionnés d'Histoire, les notes bien gérées, ordonnées à la fin du livre. On y trouve toutes les références citées, exploitées etc.



Cette monographie est une somme impressionnante et mérite d'être lue, connue.
Lien : http://espace-temps-libre.bl..
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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

Livre qui montre un camp de l'horreur réservé aux femmes. Il montre tant de figures de détenues nobles ou défigurées par la cruauté. Il est documenté et cite ses témoins directs et les sources historiques.

Il traverse les catégories.
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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

Un livre indispensable à lire absolument.
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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

Il m'a fallu beaucoup, beaucoup de temps pour lire cet essai particulièrement dense. Trop peut-être parfois. Le sujet est passionnant et l'écriture très agréable. Ce livre est très long mais le sujet est abordé avec un certain recul qui permet d'arriver à digérer les informations sans trop d'affect. C'est d'ailleurs parfois un peu étrange quand on est plus habitués aux récits de rescapés.

Des centaines (des milliers ?) de femmes se croisent dans ces pages et il parfois difficile de retenir l'histoire de chacune. C'est la partie de ce livre qui m'a dérangée par moment : il couvre une période vaste et en voulant trop en dire, il perd un peu le lecteur en route. En même temps, cela permet également qu'aucune de ces femmes ne tombe dans l'oubli, et même si cela rend la lecture plus difficile, c'est extrêmement important. Au final, malgré une lecture parfois un peu laborieuse en raison de la somme d'informations, un essai très documenté au style agréable qui offre un éclairage intéressant sur un camp pour femmes dans l'Allemagne nazie.
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Si c'est une femme : Vie et mort à Ravensbrück

Le camp de concentration de Ravensbrück, situé au nord de Berlin, a fonctionné de mai 1939 à fin avril 1945. C'est le seul camp de concentration nazi destiné aux femmes. La première année il y a moins de 6000 prisonnières, la plupart allemandes (communistes, témoins de Jéhovah, droit commun, prostituées, Tsiganes, Juives) puis ce chiffre monte en puissance et, au faîte de son activité, Ravensbrück compte 45 000 femmes. 130 000 y seraient passées en six ans d'existence. L'autrice estime à 40 ou 50 000 le nombre de celles qui y seraient mortes.



Sarah Helm, journaliste britannique, a réalisé un travail magistral pour produire cet intéressant ouvrage de 800 pages. Elle est partie d'entretiens avec des survivantes et les remerciements à la fin montrent à quel point ça n'a pas toujours été facile pour les retrouver, particulièrement en Europe de l'est et en ex-URSS. Ces rencontres ont été complétées par des témoignages écrits (comme ceux de Germaine Tillion ou Margarete Buber-Neumann) et des documents d'archives. L'étude suit un plan chronologique et tous les aspects de la vie du camp sont abordés : blocks d'hébergement, nourriture insuffisante, travail forcé dans les camps satellites ou au profit d'entreprises comme Siemens qui a installé une annexe dans le camp, "expériences médicales" pratiquées sur des cobayes humains surnommées les Lapins, brutalités des gardiennes et des prisonnières qui encadrent leurs co-détenues, solidarité entre femmes de même nationalité.



J'ai apprécié qu'un des objectifs de l'autrice soit d'individualiser ces femmes que les nazis avaient tenté de déshumaniser. Les récits de vie permettent cela, d'autant plus qu'elle ne prend pas seulement ses personnages au moment où elles sont dans le camp mais qu'elle remonte, chaque fois que possible, aux circonstances antérieures qui les ont menées là. Elle évoque aussi celles qui sont généralement passées sous silence : les "asociales" comme les prostituées. Après guerre ces femmes n'ont pas été aidées, elles n'ont pas touché d'indemnités, elles n'ont pas été invitées à témoigner aux procès. Bien souvent on ne sait donc pas qui elles sont et les témoignages écrits de déportées-résistantes ne mentionnent pas leurs noms. On a opposé triangle rouges (politiques) et triangles noirs (asociales) alors que, fait remarquer Sarah Helm, on peut être à la fois prostituée et résistante, des bordels ayant souvent caché des personnes recherchées (aviateurs).



A partir de 1944, le camp devient surpeuplé. Plus de place dans les blocks, on monte de grandes tentes dans lesquelles il pleut. Alors les conditions de survie deviennent tellement difficiles que ce qui me vient à l'esprit pour en donner un aperçu c'est l'image des cercles de l'Enfer de Dante. La lecture n'est pas toujours agréable. De façon paradoxale les détenues qui sont entrées tardivement dans le camp ont moins bien résisté que les plus anciennes. Celles-ci avaient eu le temps de faire leur trou, de nouer des contacts et des solidarités qui les ont aidées à tenir. Dans le grand capharnaüm qu'est devenu le camp les dernières arrivées n'ont plus aucun cadre auquel se raccrocher et meurent rapidement.



Seul camp de concentration de femmes, le camp de Ravensbrück est aussi, semble-t-il, le seul où des détenues aient été assassinées de façon systématique. A côté de Ravensbrück se situe le camp d'Uckermark ou camp des jeunes car il a d'abord servi à interner des jeunes délinquantes. Ce camp devient en 1945 un lieu d'extermination. On y tue par la faim, par le froid, par balles et on y installe une chambre à gaz. Il y a alors la volonté d'effacer traces et témoins des crimes commis là avant l'arrivée des vainqueurs. Avant la fin, une partie des détenues (17 000) sont sauvées par les Croix Rouges suédoise et suisse qui négocient leur exfiltration avec Himmler. Il semblerait que ce dernier a accepté ces négociations car il espérait se placer en interlocuteur valable (et successeur d'Hitler) auprès des Alliés.



En couverture, la photo d'Evguénia Klemm, jeune, avant la guerre. Professeure à Odessa, arrivée à Ravensbrück en février 1943 avec un groupe de jeunes médecins et infirmières de l'armée rouge elle a fait de ces jeunes femmes effrayées un groupe soudé et solidaire. Elle les a galvanisées par son énergie et ses propos : vous êtes de l'armée rouge, vous êtes des prisonnières de guerre, vous avez des droits. Elle les a aidées à tenir.



A leur retour en URSS, les détenues soviétiques ont été inquiétées. En 1946, 1949 et 1950 il y a eu des procès d'anciens prisonniers pour collaboration avec les fascistes. Klemm y échappe mais, en septembre 1953, on lui interdit d'enseigner. Elle se suicide.



Un livre pas toujours facile à lire, je l'ai déjà dit mais très bien documenté et rédigé dans une optique résolument féministe avec la volonté d'évoquer celles qui ont été passées sous silence et de questionner le moindre intérêt des historiens pour ce camp jusqu'à présent (la guerre froide est aussi responsable, il se situait en ex-RDA). Parmi les femmes présentées j'ai découvert de nombreuses figures d'héroïnes.
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