« Paul-Henri. » Je n’arrivais pas à m’habituer à ce nom. Chez moi, j’avais été »Pavel » ou plutôt « Pavliček », le diminutif habituel, ou encore « Gagl », sans compter une kyrielle de petits noms affectueux. Puis, de Paris à Néris, j’étais devenu « Paul », ce qui, pour un enfant, était tout de même autre chose. Paul, je me sentais plus exactement comme « Pavliček », mais « Paul-Henri » était bien pire encore : j’avais franchi une ligne, j’étais passé de l’autre côté. Paul aurait pu être tchèque et juif, mais Paul-Henri ne pouvait être que français et résolument catholique : or ça, je ne l’étais pas de manière naturelle. D’ailleurs, je n’en finis pas là avec mes changements de noms : par la suite, je devins « Shaul », en débarquant en Israël, puis « Saul », un compromis entre le « Saül » qu’exige le français et le « Paul » que j’avais été. Bref, impossible de m’y retrouver, ce qui, somme toute, me paraît être l’expression adéquate d’une confusion réelle et profonde.