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Citation de Charybde2


Bardonecchia, dernière gare piémontaise avant la frontière française. L’exceptionnel redoux qui depuis une semaine a effacé la neige des rues et dépeuplé les hôtels à skieurs persiste. On est fin janvier, l’allongement des jours s’affirme et, à 8 h 10, le monde apparaît en pleine lumière, tel qu’il est quand les humains n’y sont pas. Sous le ciel froid, entre les murailles noires des pentes presque à pic, pèse la tristesse irrémédiable des lieux si hauts qu’on ne peut plus en redescendre.
La placette devant la gare est déserte. Arrivé sur le tortillard de Turin, Pierre Dhiboun s’y est retrouvé seul en quelques minutes, après la dispersion en divers véhicules de la demi-douzaine de personnes descendues du même convoi. Très mince, très grand, en jean, T-shirt noir et blouson de cuir, d’une sveltesse soulignée par sa pose : jambes légèrement écartées, doigts de la main droite retenant les lanières qui lui scient le trapèze, Dhiboun maintient contre son dos un sac de sport chic et cher. Il consulte sa montre puis examine les lieux, la chaussée déserte, les volets clos des édifices qui la bordent, l’abribus couvert de faire-part de décès. Son regard s’arrête sur un bâtiment à un étage, dont les murs extérieurs plaqués de bardeaux vernis s’ornent de marmites anciennes suspendues à des chaînes, ripolinées de noir et remplies de fleurs fades. « Taverna della Stazione », annonce l’enseigne. En avançant, Dhiboun scrute l’étroite vitrine derrière laquelle il ne peut voir un sexagénaire grisonnant qui, tout en saisissant un cappuccino posé à côté de lui, a levé les yeux de l’écran d’un ordinateur portable et maintenant le regarde venir.
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