D'après ce que nous savons des prohibitions obsessionnelles, voici comment nous pouvons reconstituer l'histoire du tabou. Les tabous seraient des prohibitions très anciennes qui auraient été autrefois imposées du dehors à une génération d'hommes primitifs, qui auraient pu aussi lui être inculquées par une génération antérieure. Ces prohibitions portaient sur des activités qu'on devait avoir une grande tendance à accomplir. Elles se sont ensuite maintenues de génération en génération, peut-être seulement à la faveur de la tradition, transmise par l'autorité paternelle et sociale. Il se peut aussi qu'elles soient devenues une partie « organique » de la vie psychique des générations ultérieures […]. Mais le maintien du tabou a eu pour effet que le désir primitif de faire ce qui est tabou a persisté chez ces peuples. Ceux-ci ont donc adopté à l'égard de leurs prohibitions tabou une attitude ambivalente ; leur inconscient serait heureux d'enfreindre ces prohibitions, mais ils craignent de le faire ; et ils le craignent parce qu'ils voudraient le faire, et la crainte est plus forte que le désir.