AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Smaïl Medjeber (2)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées
Le mal-être amazigh en Afrique du Nord

Dès l'introduction, l'auteur cite un extrait d'un ouvrage de Tahar Djaout, écrivain, poète et romancier algérien, décédé suite à un attentat en juin 1993 : " je suis de l'autre race, celle des hommes qui portent jusqu'au tréfonds de leurs neurones des millénaires de soleil".



Cette "autre race", c'est le peuple Amazigh, aussi dénommé berbère, terme donné par les arabes après les romains, ou kabyle par l'occupant français, "peuple à traditions animistes, païennes, un peuple enraciné, attaché à la nature et à sa terre natale qu'est l'Afrique du Nord".



Ce peuple amazigh qui a ployé sous le joug des différents occupants ayant conquis l'Afrique du Nord, romains, arabes et français à partir de 1830 jusqu'en 1962, date à laquelle, après l'indépendance de l'Algérie, il s'est retrouvé "colonisé" par le nouveau pouvoir de la "République algérienne, démocratique et populaire", état miné par la corruption, qui tente d'étouffer sa culture et sa langue.



Mais d'abord, qu'est-ce être amazigh ?

"est amazigh ce qui n'est pas d'origine étrangère, c'est à dire ce qui n'est ni punique, ni latin, ni vandale, ni byzantin, ni arabe, ni turc, ni européen ..." (Jean Duvignaud, Chebika)

Amazigh signifie homme libre. C'est le nom que s'est donné ce peuple, occupant originel de l'Algérie, ainsi que d'une partie du Maroc, de la Tunisie, de la Libye réunis dans l'Antiquité sous le nom de royaume de Numidie. Ces amazighs entretiennent des relations complexes avec les arabes qui ont conquis l'Afrique du Nord au 7è siècle, mais ils en ont adopté la religion et la langue, tout en conservant leur propre langue et leur culture.

Cet ouvrage constitue donc une tentative intéressante, de dégager et d'éclairer l'identité amazigh.

L'auteur, Smaïl Medjeber, fervent militant et défenseur ardent de la cause amazigh, revendique haut et fort son identité et s'est impliqué totalement dans la défense de ce peuple, ce qu'il nous fait sentir à travers son témoignage, brûlot passionné pour la reconnaissance de l'amazighité, que le pouvoir en place en Algérie depuis l'indépendance, a tenté d'annihiler par tous les moyens :

"Algérie, pleure ô pays bien-aimé ! Pauvre Algérie ! Une Algérie qui devrait être un grand paradis, par ses belles montagnes, ses magnifiques collines, ses belles plages, son soleil, ses belles filles et ses beaux garçons, en plus de ses ressources souterraines. Cette Algérie qui fut le grenier à blé de Rome. Ce pauvre et pourtant riche pays est devenu un enfer pour le peuple. Ce peuple qui se retrouve écrasé par les tenants du pouvoir totalitariste, des généraux je-m'en-foutistes, des sans âmes, des prédateurs, entourés de leurs larbins, leurs bonniches, leurs sous-fifres.... etc"

Pas étonnant qu'après de telles diatribes l'auteur se soit retrouvé emprisonné par la junte militaire au pouvoir depuis l'indépendance !



A travers sa charge virulente contre le gouvernement algérien, l'auteur dénonce l'intolérance de l'arabo-islamisme, pendant à l'affirmation de l'amazighité par la libre expression de sa langue et culture.

"L'arabe classique serait seul garant de la nation et de l'unicité de l'islam." et certains voient d'un mauvais oeil toute référence à une civilisation antérieure à la conquête arabe !

"quand on veut exterminer un peuple, on commence par sa langue". Heureusement, la langue, reflet de l'identité d'un groupe humain, le tamazight est enfin actuellement reconnue !



Cet ouvrage n'est pas véritablement un essai ; il y a en dehors de données historiques, d'une chronologie du terrorisme d'état, débutant par l'assassinat de Krim Belkacem, chef amazigh historique du FLN, (signataire des accords d'Evian, assassiné par la Sécurité Militaire algérienne en 1970), l'évocation de personnalités amazighes de l'Antiquité, telles Massinissa et Jugurtha, du Moyen-Age, de la Renaissance et même contemporaines dont Kateb Yacine ... et de magnifiques envolées lyriques, issues d'un certain nombre d'articles, et compilations diverses.



Malgré l'aspect un peu brouillon de la narration, tout ceci cherche à donner un reflet exact, quoique tronqué, forcément, de par la brièveté de l'ouvrage, de l'identité amazigh. Et même si cet ouvrage possède une architecture quelque peu bancale, il a le mérite de nous la faire découvrir avec la passion qui anime l'auteur. Ce qui est loin d'être négligeable.

"Que de souffrances, que de larmes, que de tortures, que d'humiliations, que de mépris, que de privations, que de sacrifices, que d'incompréhensions, il aurait fallu subir, pour qu'aujourd'hui l'on puisse dire, écrire sur un mur, sur un papier, sur un tableau, sur une banderole, sur un décret présidentiel, sur une constitution : le mot AMAZIGH". - Smaïl Medjeber.



Et je remercie Babelio ainsi que les éditions Jets d'Encre pour l'envoi de ce livre, obtenu lors de la dernière Masse Critique.



Commenter  J’apprécie          131
Le mal-être amazigh en Afrique du Nord

"Après les Phéniciens sont venus les Romains. Après les Romains, les Vandales. Après les Vandales, les Byzantins. Après les Byzantins, les Arabes. Après les Arabes, les Turcs. Après les Turcs, les Français".

Cette citation de l'anthropologue et écrivain Mouloud Mammeri en 1984 donne le ton. L'Afrique du nord est à l'origine Amazigh, c'est-à-dire Kabyle. Comme l'Australie est Aborigène, l'Amérique Amérindienne.

Smaïl Medjeber dresse ici un historique de l'Algérie et des luttes qu'il a menées, jusqu'à être emprisonné, pour réhabiliter la culture Amazigh. Homme libre, comme la signification du mot Amazigh, l'auteur dénonce les pouvoirs en place depuis toujours en Algérie.

J'ai appris beaucoup, et bien que le texte soit par moments compliqué à lire dans sa forme un peu universitaire, les anecdotes et récits historiques sur cette culture qui est celle d'où je viens m'ont vraiment intéressée. A travers l'histoire, la politique, le militantisme et la religion, Smaïl Medjeber retrace toute l'histoire de l'Afrique du Nord, qui, rappelle-t-il n'est pas arabe. De même que l'islam n'est pas arabe, aucun peuple ne saurait se définir par sa croyance, bien souvent instrumentalisée à des fins politiques. J'ai apprécié les nombreuses références aux auteurs comme Kateb Yacine, aux chanteurs comme Slimane Azem, Aït Menguellet, défenseurs de la culture kabyle à travers leurs textes, et d'autres personnages de l'histoire plus ancienne comme Massinissa, Fadhma N'Soumer, qui éclairent, tels des lampadaires, cette réflexion plus que nécessaire.

Je remercie Babelio et les éditions Jets d'Encre pour l'envoi de cet ouvrage salutaire.
Commenter  J’apprécie          70


Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Smaïl Medjeber (4)Voir plus

Quiz Voir plus

Vendredi ou La Vie sauvage, Michel Tournier

L'aventure de Robinson et Vendredi se déroule:

Au XVIe siècle
Au XVIIIe siècle
Au XIXe siècle

20 questions
3562 lecteurs ont répondu
Thème : Vendredi ou La Vie sauvage de Michel TournierCréer un quiz sur cet auteur

{* *}