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Citation de Partemps


NOTES SUR LE THÉÂTRE


Les flammes de l’été, hélas et d’autres ! civilisation qui veut des théâtres, tu ne sais, à défaut d’un art y officiant, les construire[12], si bien que comme l’effroyable langue du silence gardé le feu se darde et s’exagère puis change en une cendre tragique la badauderie des villes, tout (à cette heure de clôture) communique la désuétude de la scène. Nos prochains fastes publics ou un fastidieux anniversaire s’il n’exulte par quelque démonstration comme de modernes Jeux ! ainsi que toujours se produiront sans allusion à un embrasement idéal que les couleurs patriotiques aux étages claquetant dans la brise d’insignifiance.

L’occasion de rien dire ne surgit, et je n’allègue, pour la vacuité de cette étude dernière non plus que de toutes, plaintes discrètes ! l’année nulle : mais plutôt le défaut préalable de coup d’œil apporté à l’entreprise de sa besogne par le littérateur oublieux qu’entre lui et l’époque existe une incompatibilité. — Allez-vous au théâtre ? — Non, presque jamais — à mon interrogation cette réponse, par quiconque, de race, singulier, artiste choie sa chimère hors des vulgarités ou se suffit femme ou homme du monde, avec l’instinctif bouquet de son âme à nu dans un intérieur. — Au reste, moi, non plus ! — aurais-je pu intervenir si la plupart du temps mon désintéressement ici ne le criait à travers les lignes jusqu’au blanc final.

Alors pourquoi…

Pourquoi ! autrement qu’à l’instigation du pas réductible démon de la Perversité que je promulgue ainsi « faire ce qu’il n’y a lieu de faire, sans avantage exprès à tirer, que la gêne vis-à-vis de choses, à quoi l’on est par nature étranger, de feindre y porter un jugement ; alors que le joint dans l’appréciation échappe et qu’empêche une pudeur l’exposition à faux jour de suprêmes et intempestifs principes. » Risquer, dans des efforts vers une gratuite médiocrité, de ne jamais qu’y faillir, rien n’obligeant du reste à cette contradiction que le charme peut-être inconnu en littérature d’éteindre strictement une à une toute vue qui éclaterait avec pureté, ainsi que de raturer jusqu’à de certains mots dont la seule hantise continue chez moi la survivance d’un cœur, et que c’est en conséquence une vilenie de servir mal à propos. Le sot bavarde sans rien dire, mais ainsi pécher à l’exclusion d’un goût notoire pour la prolixité et précisément afin de ne pas exprimer quelque-chose, représente un cas spécial, qui aura été le mien : il vaut que je m’exhibe (avant de cesser) en l’exception de ce ridicule, comme un pitre monologuiste des cafés-concerts où des feuillages nous servent une halte entre le Théâtre et la Nature, ces deux termes distincts et superbes de l’antinomie proposée une à Critique.

J’aurais aimé, avec l’injonction de circonstances, mieux que finir oisivement, ici noter quelques traits fondamentaux.

Le ballet ne donna que peu : c’est le genre imaginatif. Quand s’isole pour le regard un signe de l’éparse beauté générale, fleur, onde, nuée et bijou etc, si chez nous le moyen exclusif de le savoir consiste à en juxtaposer l’aspect à notre nudité intime afin qu’elle le sente analogue et se l’adapte selon quelque confusion exquise d’elle avec cette forme envolée, rien qu’au travers du rite là énoncé de l’Idée est-ce que ne paraît pas la danseuse à demi l’élément en cause, à demi humanité apte à s’y confondre, dans la flottaison de rêverie ? Voilà l’opération poétique par excellence d’où le théâtre. Immédiatement le ballet résulte allégorique : il enlacera autant qu’animera, pour en marquer chaque rytthme, toutes corrélations ou Musique d’abord latentes entre ses attitudes et maint caractère, tellement que la représentation figurative des accessoires terrestres par la Danse contient une expérience relative à leur degré esthétique. Temple initial ouvert sur les vrais temps, un sacre s’y effectue en tant que la preuve de nos trésors, ainsi. À déduire le point philosophique auquel est située l’impersonnalité de la danseuse, entre sa féminine apparence et quelque chose mimé, pour cet hymen ! elle le pique d’une sûre pointe, le pose acquis ; puis déroule notre conviction en le chiffre de pirouettes prolongé vers un autre motif, attendu que tout, dans l’évolution par où elle illustre le sens de nos extases et triomphes entonnés à l’orchestre, est, comme le veut l’art même, au théâtre, fictif ou momentané.

Seul principe ! et ainsi que resplendit le lustre c’est à dire, lui-même, l’exhibition prête au regard, sous toutes les facettes, de quoi que ce soit ou vérité adamantine, une œuvre dramatique montre la succession des extériorités de l’acte sans qu’aucun moment garde de réalité et qu’il se passe en fin de compte rien.

Le vieux Mélodrame qui, conjointement à la Danse et sous la régie aussi du poëte, occupe la scène, s’honore de satisfaire à cette loi. Apitoyés, le perpétuel suspens d’une larme qui ne peut jamais toute se former ni choir (encore le lustre) scintille en mille regards, or un ambigu sourire déride ta lèvre par la perception de moqueries aux chanterelles ou dans la flûte refusant leur complicité à quelque douleur emphatique de la partition et y perçant des fissures de jour et d’espoir : spirituel avertissement et fil jamais rompu même si malignement il cesse, tu n’omets d’attendre ou de le suivre, au long du labyrinthe de l’angoisse que complique l’art non pour vraiment t’acabler comme si ce n’était point assez de ton sort ! spectateur assistant à une Fête, mais te replonger de quelque part dans le peuple que tu sois au saint de la Passion de l’Homme et t’en libérer selon quelque source mélodique de l’âme. Pareil emploi de la Musique qui la tient prépondérante comme magicienne, attendu qu’elle emmêle et rompt ou conduit notre divination, bref dispose de l’intérêt, la façonne seul au théâtre : il instruirait les compositeurs prodigues au hasard et sans l’exacte intuition de leur magnifique don de sonorité. Nulle inspiration ne perdra à étudier l’humble et profonde sagacité qui règle en vertu d’un besoin populaire les rapports de l’orchestre et des planches dans ce genre génial et français. Les axiômes s’y lisent, inscrits par personne ; un avant tous les autres ! que chaque situation insoluble comme elle le resterait en supposant que le drame fût autre chose que semblant ou piège à notre irréflexion, refoule, dissimule, et toujours contient le rire sacré qui la dénouera. Ce jeu perpétué les Pixéricourt et les Bouchardy de cacher dans le geste d’apparat dévolu au tragédien le doigté subtil d’un jongleur, c’est toute la science. La funèbre draperie de leur imagination ne s’obscurcit jamais au point d’ignorer que l’énigme derrière ce rideau n’existe sinon grâce à une hypothèse tournante peu à peu résolue ici et là par notre lucidité : mieux que le gaz ou l’électricité la gradue l’accompagnement instrumental, dispensateur du Mystère.

À part la curiosité issue de l’intrusion du livre et, puiqu’après tout il s’agit de littérature et de vie maintenant repliées aux feuillets, un désir en ceux-ci de se déverser à la rampe, ainsi que vient de le faire le Roman, je ne sais. Il ne convient pas même de dénoncer par un verbiage le fonctionnement du redoutable Fléau omnipotent… l’ère a déchaîné, légitimement vu qu’en la foule ou l’amplification majestueuse de chacun gît abscons le rêve ! chez une multitude la conscience de sa judicature ou de cette intelligence suprême, sans préparer de circonstances neuves ou le milieu mental identifiant la scène et la salle. Toujours est-il qu’avant la célébration des poëmes étouffés dans l’œuf de quelque future coupole manquant (si cette date s’accommodera de l’état actuel ou ne doit poindre qu’en raison de notre oblitération, doute) il a fallu formidablement au devant de l’infatuation contemporaine, ériger entre le gouffre de leur vaine faim et les générations un simulacre approprié au besoin immédiat, ou l’art officiel qu’on peut aussi appeler vulgaire ; indiscutable prêt à contenir par le voile basaltique du banal la poussée de cohue contentée pour peu qu’elle aperçoive une imagerie brute de sa divinité. Machine crue provisoire pour l’affermissement de quoi, à mon sens institution plutôt vacante et durable me convainquant par son opportunité ! l’appel a été fait à tous les cultes artificiels et poncifs ; elle fonctionne en tant que les salons annuels de Peinture et de Sculpture, quand chôme l’engrenage théâtral. Tordant à la fois comme au rebut chez le créateur le jet délicat et vierge et une jumelle clairvoyance directe du simple, qui peut-être avaient à s’accorder encore. Héroïques donc artistes de ces jours plutôt que peindre une solitude de cloître à la torche de votre immortalité ou sacrifier devant l’idole de vous-mêmes, mettez la main à ce monument, indicateur non moins énorme que les blocs d’abstention laissés par quelques âges qui jadis ne purent que charger le sol d’un vestige négatif et considérable.

Stéphane Mallarmé
Théodore de Banville : Les Caprices en dizains à la manière de Clément Marot (XVIII, Hamlet). — Les Cariatides.
Chez Calmann Lévy (Nouvelle édition, 1886).
M. Gondinet, on sait.
Fût-ce l’expressive et gracieuse mademoiselle Sanlaville.
Lire le merveilleux Journal des Goncourt, livre 1er, dans de récents Figaro
Par Edmond de Goncourt, Paris, 1884.
Au 3e acte, Rôle de en Raffa.
Au Casino Vivienne.
Ulalume (strophe II) par Edgar Poe.
Rouvert mon Racine, ces derniers temps.
Là est la suprématie des modernes vers sur ceux antiques formant un tout et ne rimant pas ; qu’emplissait une bonne foi le métal employé à les faire, au lieu que, chez nous, ils le prennent et le rejettent, incessamment deviennent, procèdent musicalement : en tant que Stance, ou distique.
Une Salle doit surtout être machinée et mobile, à l’ingénieur, avant l’architecte, en revient la construction : que ce héros du moderne répertoire se montre un peu !
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