L’amirauté ne commence à lui laver le cerveau que deux mois plus tard, à bord du Ville-d’Oran qui le convoie de Marseille à Alger.
– Regarde cette photo.
Elle montre un soldat français éventré, le buste rempli de sable et de cailloux. Jim ne peux pas détourner les yeux, il doit obéir.
– Tu vois ce qu’ils font, les Arabes. Regarde cette autre photo.
Il y devine un enfant dont le corps tenu par les pieds a été éclaté contre un rocher, battu sur la pierre comme un tapis qu’on dépoussière.
– Et celle-ci.
Une femme, le front fendu d’un coup de hache.
– Et cette autre.
Un bébé, démembré, décapité.
– Imagine que c’est ton fils.
Jim dévisage les quartiers-maîtres chargés de la propagande. Il n’est pas dupe. Il lit dans leur jeu, et dans celui de leurs supérieurs. Il n’a aucune intention de se soumettre à leur volonté. Il accepte d’aller faire la guerre, mais en refuse la justification.