"L'enfer c'est les Autres" a toujours été mal compris. On a cru que je voulais dire par là que nos rapports avec les autres étaient toujours empoisonnés, que c'était toujours des rapports interdits. Or, c'est tout autre chose que je veux dire. Je veux dire que si les rapports avec autrui sont tordus, viciés, alors l'autre ne peut être que l'enfer. Pourquoi ? Parce que les autres sont au fond ce qu'il y a de plus important en nous-mêmes pour notre propre connaissance de nous-mêmes... Quoi que je dise sur moi, toujours le jugement d'autrui entre dedans, quoi que je sente de moi, le jugement d'autrui entre dedans. Ce qui veut dire que si mes rapports sont mauvais, je me mets dans la totale dépendance d'autrui et alors, en effet, je suis en enfer. Et il existe une quantité de gens dans le monde qui sont en enfer parce qu'ils dépendent trop du jugement d'autrui. Mais cela ne veut nullement dire qu'on ne puisse avoir d'autre rapport avec les autres. Ca marque simplement l'importance capitale de tous les autres pour chacun de nous (préface à un enregistrement de Huis clos).
Si nous avons défini la situation de l'homme comme un choix libre, sans excuses et sans secours, tout homme qui se réfugie derrière l'excuse de ses passions, tout homme qui invente un déterminisme est un homme de mauvaise foi... Les uns qui se cacheront, par l'esprit de sérieux ou par des excuses déterministes, leur liberté totale, je les appellerai lâches ; les autres qui essaieront de montrer que leur existence était nécessaire, alors qu'elle est la contingence même de l'apparition de l'homme sur la terre, je les appellerai des salauds (L'Existentialisme est un humanisme).
Pour que je me sentisse nécessaire, il eût fallu qu'on me réclamât. Ma famille m'avait entretenu quelque temps dans cette illusion ; on m'avait répété que j'étais un don du Ciel, très attendu, indispensable à mon grand-père, à ma mère : je n'y croyais plus mais j'avais gardé le sentiment qu'on naît superflu à moins d'être mis au monde spécialement pour combler une attente (Les Mots).
L'existence précède l'essence : cela signifie, écrit Sartre dans L'Existentialisme est un humanisme, que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait.
L'existentialiste lorsqu'il décrit un lâche, dit que ce lâche est responsable de sa lâcheté. Il n'est pas comme ça parce qu'il a un coeur, un poumon ou un cerveau lâche, il n'est pas comme ça à partir d'une organisation physiologique, mais il est comme ça parce qu'il s'est construit comme lâche par ses actes (L'Existentialisme est un humanisme).
L'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie (L'Existentialisme est un humanisme).
Un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises (L'Existentialisme est un humanisme).