Il peut paraître étrange que sur une île large de cinquante milles, dans un village au pied de falaises éternellement tournées vers la mer, un enfant puisse atteindre l'âge d'homme sans avoir jamais posé le pied sur un bateau, ou trempé ne serait-ce qu'un doigt dans de l'eau salé, mais c'est ainsi. Qu'il soit fermier, chevrier, bouvier, chasseur ou artisan, l'homme de la terre considère l'océan comme le royaume salé et instable qui ne le concerne en aucune façon. Le village situé à deux jours de marche du sien est une terre étrangère, et l'île qui se trouve à une journée de voile de la sienne n'est qu'une rumeur, tout juste des collines embrumées qu'il aperçoit au-delà des eaux, et qui n'ont pas la solidité de la terre qu'il foule de ses pieds.