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Citation de KATE92


Gabrielle Saint-Jean descendait souliers à la main
dans l’espoir d’échapper à la vigilance de Chuong,
mais le petit garçon l’attendait déjà au pied de l’escalier, les yeux brillants d’impatience.
— Bonjour monsieur Chuong, dit-elle pour le
faire rire.
— Bonjour Ba dam, hoqueta-t-il, ravi. Ba dam
veut thé ? Chuong tout préparé.
— « Madame veut-elle du thé ? », corrigea-t-elle.
« J’ai tout préparé. » Répète.
Il prit son air de chenapan et s’enfuit vers la salle à
manger. Elle fut bien obligée de traverser le salon disparate pour le rejoindre dans l’antre du buffet
Henri II. On avait laissé sa place mise afin de souligner son absence au petit déjeuner. Son thé au jasmin
refroidissait sous une soucoupe retournée. Elle s’assit
et regarda Chuong découvrir le breuvage insipide
avec un sérieux de maître de cérémonie. Elle mourait
d’envie de l’embrasser, mais cela ne se faisait pas chez
les Annamites. Il fallait respirer le visage des petits,
bouche entrouverte, comme si l’on s’apprêtait à les
dévorer. Chuong avait un minuscule menton volontaire, un teint d’abricot pâle et des baguettes d’ébène
13qui seraient bientôt ramassées en chignon. S’il n’était
pas grand pour ses dix ans, son intelligence était celle
d’un enfant plus âgé. Elle avait suggéré qu’on l’envoie
à l’école et entendait encore le gloussement inepte de
sa belle-mère, tandis que son beau-père se retranchait
derrière son journal.
— Ne bouleversons pas l’ordre des choses, avait
conseillé François.
— Tu n’es pas sérieux ! s’était-elle exclamée, horrifiée par l’apathie coloniale de son mari.
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