Vanessa Maniez

Hier a été une très mauvaise journée, de celles qui vous feraient douter de vouloir même vous lever à nouveau. Elle a fait piquer sa chienne malade (un labrador, superbe) et son chéri l’a quittée. Aucun lien de cause à effet, n’en cherchez pas. Ils étaient allés prendre un verre sur la côte, l’un de ces fameux derniers verres. Pas un seul instant elle n’avait soupçonné l’imminence de la rupture. C’est plutôt décevant, comme on croit parfois bien connaître les gens. Les années passées à leurs côtés semblent dès lors bien vaines, lointaines ou inutiles, c’est selon. La mer était déchaînée. Elle était belle, impérieuse. Comme souveraine. C’est ainsi qu’elle la préfère. Il lui a dit : « je t’aime, mais je ne te comprends plus. Je ne peux pas continuer à me détruire, Marie, tu comprends bien, si tu ne fais plus d’efforts de ton côté. Je n’en ai plus la force. Et crois-moi, ces trois ans à tes côtés, nos projets, nos envies… ne changeront en rien ma décision. Ma décision de te quitter, Marie. » Elle a souri, pour essayer de remplir ce gouffre soudain qui scindait ses entrailles, mais non, elle ne comprenait pas. Elle ne resituait pas même la destruction ni l’absence d’efforts auxquelles il faisait référence. Elle se sentait une étrangère subite, face à cet homme qui l’avait si souvent serrée contre son cœur en lui promettant la lune et les étoiles qui vont avec. Alors elle n’a rien dit. Elle a regardé les lames vertes se fracasser sur la roche sombre, tandis que les mots dont il ne cessait de l’accabler maintenaient leur pression de fonte sur son cerveau.