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Citation de LiliGalipette


Or, il n'y avait qu'un seul animal capable de créer ce tableau. Le Grand Loup Blanc? Le seul qui pouvait faire tache pâle sur l'ombre.

Agaguk, rivé au sol, complètement immobile, mais le fusil bien en joue, attendit que l'animal vint encore plus près. Bientôt l'odeur en fut si forte qu'il en ressentit de la nausée. Et ce n'était plus une tache, mais la forme bien identifiée d'un loup rampant sur le ventre. Lui aussi à l'affût de sa proie, cherchant à retrouver la silhouette d'Agaguk maintenant écrasée sur le sol, comme fondue dans la nuit.

L'homme en face de la bête, deux ruses s'affrontant.

Si le loup venait assez proche, Agaguk lâcherait le coup, la balle tuerait l'animal.

Et s'il le manquait?

Une hélée de distance. Puis la distance d'un lancer, et finalement cent pas, cinquante... Le loup était presque à portée de la main. Seulement, il se dirigeait droit sur Agaguk, une cible étroite, difficile à déterminer dans le noir.

Agaguk colla l'œil sur la mire, la bête bien en joue contre le soleil de minuit à l'horizon.

Dix pas. C'était alors le temps ou jamais. Tout dépendait d'un geste, la pression rapide sur la gâchette, le coup, la balle... L'instant d'une seconde, et moins encore. Un destin fixé. La mort du loup? La mort de l'homme?

Agaguk pressa la détente.

La balle fut un ouragan qui jaillit du canon. Mais elle ne tua pas le loup. Elle ne fit que l'égratigner au passage. Il roula par terre et se retrouva dix pas plus loin. Il fut aussitôt sur ses pattes.

Agaguk était debout aussi, son couteau au poing.

Le loup bondit.

Une masse fantomatique, sorte de bolide lancé des airs, s'abattait sur Agaguk. L'homme et la bête basculaient dans le noir. La gueule du loup s'ouvrait, baveuse de rage, et mordait avec un grondement diabolique l'être qui se débattait furieusement entre ses pattes.

C'était entre les deux une lutte horrible, une gymnastique macabre. À chaque gueulée de la bête, le cri de l'homme s'enflait en vrille et crevait la nuit. Le loup en furie l'agrippait, le labourant à grands coups de griffes, puis l'homme saisissant la seconde propice - celle où l'animal s'arc-boutait pour foncer à nouveau - repliait son bras pour plonger le couteau dans le cuir de la bête. Alors celle-ci s'esquivait, mais pour bondir de nouveau sur l'homme qui se raidissait contre la torture.

De grands lambeaux de chair pendaient entre les dents de l'animal.

Un combat terrible, mêlé de cris et de rugissements où, tour à tour, l'homme et la bête, égaux en puissance ou en fureur, dominaient. Soudain la lame du couteau brilla. Le poing partit comme une flèche, s'abattit. Une fois, une autre et une autre fois encore.

Agaguk avait, dans la bouche, un goût sucré de sang qui lui redonnait des nerfs et de la poigne. Maintenant, à cheval sur le loup qui se démenait en hurlant, il frappait à tour de bras, toute vigueur retrouvée, toute douleur assoupie.

Puis il se releva, passa le bras sur sa figure ensanglantée et mesura en lui les forces restantes.

Le loup blanc, éventré, gisait à ses pieds.

Agaguk défit la corde qui lui servait de ceinture, en noua une extrémité autour des pattes d'arrière du loup, s'attela au fardeau et le traîna sur la toundra.
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