L'homme intelligent mis en face de ces énormes blocs de pierres brûles isolés, groupés ou assemblés qu'il rencontre encore en France, en Angleterre, en Afrique, en Amérique, partout enfin, comprend sur-le-champ que la main de l'homme les a élevés dans un but déterminé, toujours défini. Ils ont traversé les âges, monuments pour ainsi dire indestructibles, et l'archéologue retrouve en eux les origines de l'art monumental mille fois modifié dans ses formes, sous l'influence des civilisations qui se sont succédé, comme les fossiles permettent au naturaliste de reconstituer les espèces disparues depuis des milliers d'années de la surface du globe.
La période de l'Empire vit encore s'élever, ou plutôt commencer deux édifices consacrés à la gloire de l'empereur: ce sont l'arc de triomphe de l'Étoile et l'arc de triomphe du Carrousel qu'on a considérés, ajuste titre, comme offrant le résumé le plus complet des qualités et des défauts de l'architecture impériale.
Le mouvement artistique qui, partant de Florence, de Milan, de Pise, de Venise, avait gagné Rome et atteint dans cette ville son apogée à la tin de la première moitié du XVIe siècle, ne s’était que peu ralenti dans la Haute-Italie; on y construisit force palais et maints édifices religieux, mais ce fut désormais de Rome que les artistes reçurent leur impulsion. Il y aurait tout un volume à écrire sur les résultats de la centralisation en matière d’art; nous nous contenterons de dire ici, preuves en main, qu’elle fut déplorable pour l’art italien; qu’il y perdit son originalité et son indépendance et demeura impuissant, quand le moment fut arrivé de réagir contre l’envahissement du mauvais goût, devenu, pour ainsi dire, la règle générale.
L'Europe était depuis près de dix ans sous les armes lorsque commença le XIXe siècle. En France, la Vendée avait été pacifiée; mais les ouvertures de paix faites par Bonaparte devenu premier consul aux gouvernements anglais et autrichien avaient été rejetées par. Pitt et Thugurt. Une deuxième coalition de l'Europe contre notre pays se préparait et, pendant quatorze années encore, la guerre commencée, au nom de l'humanité, par la France se défendant contre l'invasion étrangère, allait être continuée par l'empire pour satisfaire l'ambition d'un homme.
Ce quart de siècle fut stérile pour l'art, on le comprend sans peine. De plus, la Révolution française, provoquée par la haine du passé, détruisit stupidement tout ce qui lui rappelait ce passé, et le nombre fut incalculable des chefs-d'oeuvre artistiques qui disparurent alors au souffle de la fureur populaire.
La grande révolution artistique à laquelle nous venons de consacrer plusieurs pages passa pour ainsi dire au-dessus de ce petit pays sans y laisser de traces; presque tous les édifices d’une certaine importance datent de la dernière moitié du XVIIe siècle.