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Citation de AuroraeLibri


Depuis longtemps, son esprit d’inquisiteur flairait le péché chez la jeune femme. Cette belle et forte créature, aux cheveux roux, aux lèvres rouges, exhalait pour elle une odeur charnelle, infernale. Malgré les répugnances de sa religion pour les images, la fanatique possédait dans sa chambre une gravure de la tentation de saint Antoine dont le tohu-bohu démoniaque plaisait à sa nature visionnaire. Ces diablotins qui tourmentaient le pauvre saint avec d’atroces grimaces, cette bouche de l’enfer qui s’ouvrait pour engloutir la vertu à la moindre défaillance, étaient un symbole fidèle de ses croyances religieuses. Dans un coin, des femmes étalaient lascivement leur gorge nue devant le vertueux ermite, et le hasard avait voulu qu’une de ces femmes eût une lointaine ressemblance avec Madeleine. Cette ressemblance frappait singulièrement l’imagination ardente de Geneviève ; elle s’épouvantait en retrouvant dans la jeune épouse de Guillaume, le sourire gras, la chevelure insolente de la courtisane, du monstre vomi par l’abîme. Souvent même elle l’appelait, dans sa pensée, avec une exaltation d’exorciste, de l’épithète latine : Lubrica, qui se trouvait écrite sur la marge de la gravure, au-dessous de la diablesse. Tout le bas de cette image, grossièrement imprimée, était ainsi couvert de noms figurés personnifiant un vice dans chaque démon. Lorsque, à la nouvelle de la résurrection de Jacques, le visage de Madeleine eut de brusques contractions, Geneviève fut convaincue que c’était le diable dont elle se trouvait possédée, qui la forçait à faire malgré elle ces grimaces de douleur. Elle crut apercevoir enfin la bête immonde cachée sous cette peau nacrée, dans cette chair de perdition, et n’aurait pas été trop étonnée de voir le corps superbe et voluptueux de la jeune femme se changer en un monstrueux crapaud. Si elle ne comprit pas le drame qui secouait la malheureuse, elle eut conscience que le péché l’étouffait. Aussi se promit-elle de la surveiller pour la mettre hors d’état de nuire, dans le cas où elle tenterait de faire rentrer, à la Noiraude, Satan qui en était sorti avec l’âme de M. de Viargue, par la cheminée du laboratoire.

Chapitre IX
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