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Citation de Cannetille


Lorsque j’ai lu la Bible des siècles après ces événements, une phrase a retenti mille fois dans mon esprit : « Tais-toi, Aaron. » J’ai beau savoir que ses rédacteurs rédigèrent le manuscrit bien plus tard, je ne peux m’ôter de l’esprit que c’est Aaron qui a écrit l’Ancien Testament. Cet épisode en particulier, s’il parle de Moïse, ne parle pas le Moïse, il parle l’Aaron. Tout y est spectaculaire, clinquant, bruyant. Tout se présente en tableaux. Tout se réalise en phrases définitives, en actes péremptoires, en gestes ostentatoires, dans des décors somptueux où la nature – ciel, foudre, eau, montagne – joue efficacement les partenaires. Tout cède au vice de l’exagération : six cent mille hommes auraient quitté la capitale pharaonienne, soit plusieurs millions d’humains en comptant femmes et enfants, soit la quasi-totalité de la population égyptienne ! Quant à Dieu, il s’avère un personnage parfait car inattendu, imprévisible, juste puis injuste, bon puis revanchard. La Bible a inventé le kitsch, c’est-à-dire une esthétique tape-à-l’œil faite pour les masses, une exhibition de péripéties boursouflées de sens, une façon d’exposer les faits qui rend la camelote luxueuse.
Heureusement que, çà et là, des passages échappent, presque subrepticement, à ce goût pompier. Aaron a beau avoir lissé, simplifié, magnifié le destin de Moïse, on perçoit encore ses hésitations, ses doutes, ses faiblesses, sa crainte de Dieu et des hommes. C’est là, dans ce qu’on appelle les contradictions de la Bible, que subsiste un peu de vérité.
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