AnnaCan le 30 avril 2024 Scénette n°1 : « Robert Smith était marié et père de trois enfants. Son psoriasis sévère était devenu un problème : dans sa vie de couple, dans son travail ; dans sa vie tout court. Sa femme Helga ne consentait plus qu’à des rapports dans le noir et en levrette. Employé à l’accueil d’un guichet postal, on l’avait finalement relégué au tri pour ne pas effrayer les clients. Et maintenant que la nuit tombait, il n’osait pas rentrer à la maison avec son nouveau visage, roulant sans but à travers la ville, l’air conditionné réglé au maximum et son matériel de pêche auquel il n’avait pas touché de la journée dans le coffre. Robert allait devoir expliquer à sa femme comment le miracle était advenu, la conséquence serait un divorce et une pension alimentaire qui le mèneraient à dormir dans sa voiture. » Mots imposés : Péché /Chevrolet / Confessionnal Scénette n°2 : « Le souci, avec les frères Bronski, c’est qu’ils étaient un véritable fléau pour la petite part d’humanité ayant affaire à eux. On pouvait aisément énumérer cet échantillon depuis qu’ils avaient fondé leur petite entreprise il y avait 24 ans (bientôt le jubilé). On devait cette exactitude à William (Billie) Bronski, le frère cadet, lequel tenait scrupuleusement le compte des disparus : 1 239 âmes. Ce qui nous fait une cinquantaine de cas par an, soit un peu moins d’une occurrence par semaine. C’est dire si les deux bonshommes étaient des bosseurs. Et vu qu’à près de 45 ans ils étaient en pleine possession de leurs moyens, on pouvait avancer l’hypothèse qu’ils monteraient en puissance, que l’échantillon irait en se multipliant et que, enfin, bon nombre de gens continueraient à chier dans leur froc en sachant qu’on les avait lâchés à leurs trousses. « Hein, quoi ? Quesse tu dis ? hurla Michael (Mike) par-dessus le bruit aigu de la scie électrique. — On n’a plus de sac de 110 litres... — Quoi ? » Mike termina de détacher l’avant-bras du cadavre, relâcha son index du Bosch Saber Saw et dégagea une oreille de son casque anti-bruit : « Tu disais, Billie ? » Billie saisit l’avant-bras découpé par le poignet, secoua les caillots de sang, et le jeta dans le sac-poubelle. « Je disais qu’on n’a plus de sac de 110 litres. Reste plus que des 35. » Mots imposés : Rotules /Cavalcade / Chacals Scénette n°3 : « Un chauffeur se dépêcha de lui ouvrir la portière et de ranger sa petite valise à roulettes dans le coffre, avant de prendre le volant derrière la séparation en plexiglas. Le temps, pour Son Éminence Jeremy Carter, de passer du confort d’un vol American Airlines en Business class à celui d’une longue limousine aux vitres teintées. La Cadillac démarra sur des coussins d’air, imposa sa masse sombre dans le flot du trafic, sûre de son importance. Assise sur la banquette arrière, jambes interminables gainées de bas à couture, tailleur bleu marine cintré, poitrine opulente, yeux verts et cheveux noirs, Brenda Moore, bouche aux lèvres charnues, longs cils – n’en jetez plus, elle est une forme possible du cliché de la pin-up –, ouvrit le minibar de la limousine et servit un whisky sec au cardinal, qui remercia d’un hochement de tête. Qu’on puisse anticiper vos désirs est un privilège. Jimmy ôta sa calotte, révélant ainsi sa calvitie. Brenda Moore fixa une mentholée à son fume-cigarette, l’alluma et souffla un nuage translucide à travers l’habitacle. » Mots imposés : Expansion /Bronchioles / Martyre ************************************** Dori, c’est toi que j’ai désignée pour imaginer une suite à l’une de ces trois histoires, chanceuse que tu es! Tu choisis UNE des trois, donc, et tu imagines pour cette histoire trois petites scénettes possibles contenant chacune les mêmes 3 mots imposés. Voici la façon dont je te suggère d’écrire tes 3 (petites) suites : La première revient dans le passé (proche ou lointain) et explique en partie l’action/la situation présente. La deuxième poursuit l’histoire au temps « présent » du récit. La troisième se projette dans un futur proche ou lointain. Je te suggère d’utiliser le passé simple dans les 3 cas, afin de rester dans le style du livre de Joseph Incardona, « Stella et l’Amérique » dont ces débuts d’histoire sont tirés. À toi ensuite de passer la main à l’un d’entre nous avec le même jeu de contraintes. |