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Critique de karmemma


A la mort de sa mère, la petite Alysia âgée de 2 ans se retrouve sous la responsabilité de son père, Steve Abbott, poète bohème et homosexuel. Tous deux partent s'installer à San Francisco où l'on suit leur épopée difficile, d'abord dans l'exaltation des années 1970, puis la noirceur surjouée des années 1980 marquées par la New Wave, et enfin des années 1990 qui sont aussi les années sida. San Francisco et plus particulièrement le Haight forment le décor magique et fascinant de ce récit intime, profondément enraciné dans l'identité de la cité californienne et dans l'esprit d'une époque mythique.

C'est un condensé d'émotions que nous livre ici Alysia Abbott, nous faisant revivre son amour véritable pour son père, mais aussi leurs moments les plus durs, l'insouciance et l'incompréhension de l'enfance, la colère de l'adolescence. Sans complaisance ni pour lui ni pour elle, elle retrace les souffrances et les joies de sa différence, en tant que seule enfant au milieu d'un cercle d'hommes s'aimant entre eux, dans une Amérique encore fortement homophobe. Sa difficulté à trouver son identité mais aussi le bonheur de se sentir spéciale et unique, enveloppée dans une relation fusionnelle avec cet homme de génie qu'est Steve Abbott.

Puis vient l'épidémie, terrible et effrayante parce que vécue de l'intérieur : le déni face au sida tant qu'il n'est pas encore "déclaré", les amis et les proches qui sont emportés les uns après les autres, la honte de s'avouer malade et la mort qui vient dans la solitude et la misère, la lente dégénérescence du corps et de l'esprit. On ne peut que partager la colère d'Alysia, quand on sait que seulement quelques années plus tard le sida cessera d'être considéré uniquement comme une maladie de déviants et ne sera plus systématiquement mortel. Combien d'années auraient été gagnées sans les a priori homophobes qui ont conduit les pouvoirs publics à fermer les yeux ?

Je ne suis pas spécialement fan du genre autofiction, mais ici j'ai été emportée dès les premières lignes par cette histoire à la fois tendre et dure, révoltante et magnifique. On est pris aux tripes et on ne lâche pas le livre avant la dernière page. Dans la dernière partie du livre, j'ai revécu la stupeur et la nausée ressenties en me promenant dans le mémorial du sida au Golden Gate Park, où la beauté et le calme paisible de la végétation côtoient le fantôme d'un drame d'une ampleur qu'on parvient à peine à imaginer.
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