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Critique de SophieLesBasBleus


Marcus aime Rose. Rose aime Marcus. de leur petit studio où ils blottissent leur amour, ils ne sortent que le soir pour gagner les bords de Seine et se rapprocher encore en dansant le tango. La vie est simple et douce pour Marcus qui, de son propre aveu, préfère "rester à l'écart. Observer les nuages, [se] perdre dans leur épaisseur, [s']imaginer de jolies histoires. Contourner le monde. Fleurir la réalité, tenir en respect le réel, son âpreté ainsi que sa pesanteur" (p.10). Rien ne devrait changer afin que cet équilibre parfait soit maintenu.
Mais voilà qu'un jour, Marcus et le tango ne suffisent plus à Rose. Voilà qu'elle souhaite avoir un bébé ! Un bébé ! Pour Marcus, ce serait "mettre en péril [leur] petite musique, découper à grands coups de ciseaux [leur] fil soyeux, et le jeter dans la Seine." (p.20) Mais face au chagrin de Rose, il cède. Il nous raconte avec une once de dérision les échecs répétés "parce que faire un bébé, figurez-vous, il faut encore y parvenir." (p.30). le ventre de Rose reste désespérément plat alors que celui de Marcus prend de plus en plus d'ampleur. Une "couvade" affirme le médecin. Face à ce qu'elle considère comme une provocation égoïste, Rose s'en va...
Et je n'en dis pas plus pour laisser aux lecteurs le plaisir de découvrir la suite des évènements !
Je n'irai pas par quatre chemins : j'ai eu un véritable coup de coeur pour ce si joli roman, pour ce conte d'aujourd'hui qui par la voix de Marcus nous parle de la vision stéréotypée que chacun de nous (quoi qu'il en ait) plaque sur le masculin et le féminin. Sur un ton espiègle qui fait la part belle à l'ironie pour démonter les clichés sur la partition des genres, Raphaël Alix nous raconte une histoire pleine de fantaisie et de tendresse. En adoptant le point de vue masculin de Marcus, il prend certes le risque que l'ironie ne soit pas perçue et que le discours soit pris au premier degré. Mais la construction du personnage de Marcus, l'utilisation des figures de style et la connivence subtilement instaurée avec le lecteur déjouent cette possibilité. "Voici le canevas, débrouillez-vous comme vous voudrez : un homme, ça se conjugue au verbe avoir, un homme ça a du cran, ça a des couilles, ça a la force, les biceps, le bagout, la voiture. Une femme, ça se conjugue au verbe être, une femme c'est joli, c'est soigné, affectueux, sensible, salope. Et enceinte. Chacun son camp : soit tu as un pénis, soit tu n'en as pas. le sexe détermine le genre." (p.101)
L'aventure de Marcus et Rose brasse allègrement les notions de genre et tout ce qu'elles portent d'artificiellement figé. J'ai ressenti cela comme une profonde bouffée d'air frais, comme un balayage salutaire des idées reçues et des conditionnements séculaires. Oui c'est un conte, une fable à laquelle j'ai adoré croire jusqu'à l'ultime page ! Vous l'avouerai-je ? Ce n'est pas sans un peu d'eau au bord des paupières que j'ai laissé partir Marcus et Rose.
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