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Critique de ginnyzz


Un roman court à la plume très élégante.


L'action se déroule à la fin du XIXème siècle. le récit s'ouvre sur Fabricio Mauro qui, sous un nom d'emprunt, s'est fait embaucher comme gardien du phare d'Amboise pour se faire oublier. Parce que Fabricio n'est pas n'importe qui. C'est le tueur du canal, qui a beaucoup oeuvré. Alors, pour mettre fin à cette spirale dans laquelle il était englué, il a postulé à ce poste solitaire, loin de tout et surtout des tentations. Ce phare est une sorte de purgatoire symbolique pour Fabricio qui y cohabite avec ses fantômes. Il y a là comme une possibilité de rédemption, en veillant à la sécurité des marins.

Ne cherche pas à situer l'action, les lieux décrits n'existent que dans l'esprit de l'auteur (ca m'a un peu perturbée au début de ma lecture). le canal de Beaulauris vient d'être mis en service, et c'est le long de ses rives que va sévir Fabricio.

La première partie de ce roman est un peu longue et répétitive. Elle présente chacune des victimes de façon précise : son lieu de vie, son quotidien, sa rencontre avec notre tueur et sa mise à mort, qui est à peu de détails près la même à chaque fois. Un point commun entre les victimes : elles sont appétissantes, elles s'ennuient dans leur vie et succombent en quelques instants au charme de Fabricio (même la religieuse). Elles ne sont pas farouches … En même temps, Fabricio est présenté comme une sorte de Casanova devant lequel les femmes se pâment, tant il est avenant et bien fait de sa personne. C'est un peu ce qui fait de lui ce tueur pas ordinaire. Il ne force aucune de ses victimes.

Tout ça fait que l'on a du mal à compatir au malheur desdites victimes. Elles apparaissent plus comme des stéréotypes de femmes faciles qui ne donnent pas une bonne image d'elles et nous empêchent de nous y attacher. Elles ne sont qu'une succession de proies faciles, des objets de désir pour Fabricio répondant à ses fantasmes déviants.

Les parties suivantes nous racontent l'histoire de Fabricio, son parcours, ses turpitudes, ses failles. C'est un jeune homme déterminé, vif, habile, instinctif, travailleur.

Il est question, entre les lignes, de maltraitance infantile, de violences conjugales et de troubles mentaux, le sexe chez Fabricio étant le plus souvent associé au meurtre. Fabricio a grandi dans une famille défavorisée, dans l'ombre d'un père alcoolique et violent. Cela a fait de lui un tueur au sang froid, calculateur, brutal. Ses meurtres deviennent vite mécaniques; il y a peu de variantes de l'un à l'autre, les lieux et les victimes sont repérés à l'avance. Bien qu'il ressente du désir charnel, il n'y a pas de place pour l'affect dans ses gestes.

On va aussi en apprendre plus sur le juge Mourrisseau qui va être en charge de l'affaire. le juge est un homme mesuré et tenace. Son enquête sera longue, elle s'étendra sur des années, mais jamais il ne va baisser les bras : c'est l'enquête de toute une vie. Il est totalement dévoué à son travail, au point d'en délaisser les siens. Il va s'acharner jusqu'à trouver la piste qui le conduira à l'assassin.

Dans ces parties-là, on trouve une nouvelle énergie et plus de rythme. J'ai préféré ces parties-là. Une fois passée l'énumération des meurtres et l'explicatif du modus operandi, ce roman se lit plutôt bien. L'auteur emploie un registre de langue littéraire, élégant, relativement soutenu, qui sied à son récit. L'écriture redevient plus fluide, avec quelques traits humoristiques plaisants.

Je dois dire que je reste un peu sur ma faim. On ne peut pas dire que l'on soit dans un journal, mais plutôt dans un récit linéaire. Ce n'est pas Fabricio qui raconte lui-même son histoire. Nous ne sommes pas non plus dans un polar, malgré le sujet. Il n'y a pas d'enquête à proprement parler. Nous suivons les protagonistes, qui tue pour l'un et qui enquête pour l'autre, mais nous n'entrons dans l'enquête à aucun moment. Nous ne suivons pas les pérégrinations du juge et de son équipe. Ce n'est pas un roman à suspens, il n'y a pas d'angoisse ici. Par contre, j'ai trouvé le petit pied de nez final bienvenue.

Pour autant, malgré la petite longueur de la première partie très descriptive, c'est un roman agréable dont j'ai apprécié le style et l'élégance de l'écriture. Nous sommes à mon sens dans de la littérature générale, ce roman est donc accessible au plus grand nombre. Bien qu'il ne plaira pas, je pense, aux amateurs de frissons, je suis sure qu'il n'aura pas de mal à trouver son public. Il y a une originalité certaine de traiter d'un sujet si noir de prime abord d'un ton si léger et distingué.
Lien : https://lyseelivres.wordpres..
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