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Critique de BazaR


Quelle joie que cette relecture ! Encore mieux que la première fois.

Mieux car, si le récit n'a pas changé en trente ans, moi j'ai changé. Je cherche moins (moins souvent) l'action à tout prix et je m'intéresse aussi plus à la psychologie des personnages.
Poul Anderson nous offre un recueil de nouvelles qui dose à merveille ces éléments. le thème est simple : le voyage dans le temps est possible, changer l'Histoire est possible, on crée donc une espèce de police du temps chargée de traquer les délinquants qui veulent effacer la seule ligne temporelle réelle : la nôtre. Les nouvelles nous envoient dans divers temps et lieux, presque toujours dans le passé, assurant des voyages en esprit absolument lumineux pour qui aime l'Histoire (personnellement c'est un des livres qui m'a réconcilié avec cette matière, là où l'école m'avait plutôt laissé indifférent).

Avec un pitch pareil, on aurait pu se contenter d'histoires manichéennes avec les gentils policiers du temps pourchassant les vilains modificateurs de notre histoire. Voire. Poul Anderson est d'une autre stature. Son personnage principal ‒ le patrouilleur Manse Everard ‒ se retrouve souvent déchiré entre son devoir de rétablir l'Histoire ou d'empêcher sa modification, et ses émotions qui peuvent tenir de l'amour pour une femme ou de la culpabilité liée à la destruction des vies humaines de toute une ligne temporelle. Les choix ne sont jamais simples.

Il est vrai qu'Everard est solide. Il résiste mieux que d'autres à ces déchirements. Dans les nouvelles, il est toujours accompagné d'un comparse moins armé sur le plan émotionnel, plus enclin à faire pencher la balance du « mauvais côté ». Pourtant, on sent qu'il cesse rapidement d'être dupe. Lors de son engagement, on lui a fixé les règles : sauvegarder notre ligne temporelle. Ce sont les descendants des humains dans un lointain futur ‒ les Danelliens ‒ qui ont créé la Patrouille dans ce but. Mais le vrai objectif est en fait de préserver la ligne temporelle qui aboutit à l'existence des Danelliens. Il se trouve que cette ligne est celle que nous connaissons, et donc il nous est facile de l'épingler du qualificatif « vraie ». La Patrouille doit bien sûr neutraliser ceux qui veulent modifier cette ligne, mais on voit en particulier dans une nouvelle qu'elle est aussi là pour provoquer les changements qui établissent cette ligne qui n'a rien de plus « naturelle » que l'infinité d'autres possibles. de sorte qu'Everard sait qu'il doit parfois se comporter comme les délinquants qu'il pourchasse, ni mieux ni moins bien.
Comment ne pas perdre la foi en son travail après cela ?
Mais Everard est solide.

Les voyages sont merveilleux : l'Angleterre du haut moyen-âge, la Perse de Cyrus le Grand (la nouvelle « le Grand Roi » est responsable en grande partie de mon intérêt pour Hérodote), l'Amérique précolombienne, Gibraltar à l'ère tertiaire qui nous offre un spectacle géologique proprement fascinant, et une splendide uchronie que l'on aurait rêvé de voir développée dans un roman spin off. C'était magique.

Je ne suis pas toujours d'accord avec les prises de position de (des personnes de) Poul Anderson ‒ je ne peux adhérer à l'idée que le monothéisme était nécessaire au développement de la science par exemple ‒ mais malheureusement, je ne pourrais jamais en discuter avec lui.
Tout ce que je peux faire, c'est poursuivre ‒ et cette fois découvrir ‒ les aventures de la Patrouille du Temps. Cela arrivera… en son temps.
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