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Critique de raton-liseur


Ce livre m'a prise par surprise. Je n'arrive plus à me rappeler dans quelles conditions j'en ai entendu parler et pourquoi je l'ai acheté, mais il dort sur mes étagères depuis un petit bout de temps et il m'a fallu cette participation à un défi de lecture balayant le continent asiatique et s'arrêtant pour un temps en Irak pour que je me décide enfin à l'ouvrir. Un livre qui se passe pendant la guerre en Irak (et pendant celles qui l'ont précédée, en Irak aussi) ne peut pas être un livre gai, et celui-là ne fait pas exception. Il est d'un immense tristesse et, probablement encore plus difficile, d'une immense résignation.
Ecrit à la première personne par Jawad, fils cadet d'une famille chiite de Bagdad, il raconte les espoirs de cet adolescent puis jeune homme. Son combat personnel d'abord pour tenter de devenir lui-même, refusant d'exercer le métier de son père, qui lave les corps et les prépare avant qu'ils soient enterrés, et se rêvant sculpteur, à l'image de Giacometti, qu'il admire. Mais la vie tout court et la vie en période de guerre n'est pas tendre avec les rêves, et Jawad conte les déboires qui s'enchaînent, les renoncements qui viennent les uns après les autres.
Il y a peu à dire car il se passe peu, mais le livre m'a emportée, j'ai eu la sensation de voir ma vie m'échapper peu à peu comme Jawad, de voir les perspectives d'avenir se fermer après les autres, de voir mes options se réduire à peau de chagrin. C'est un livre sans lumière (malgré ce que pourrait laisser croire les couleurs saturées de la couverture choisie par Actes Sud), qui absorbe toute étincelle, qui éteint le moindre brasier. La guerre et ses horreurs sont là, en arrière-plan, mais elle n'a pas besoin d'être sur le devant de la scène. le propos de Sinan Antoon n'est pas la guerre mais comment la guerre touche tous ceux qui vivent dans son voisinage immédiat. Bien que n'étant pas directement concerné par les conflits et les horreurs, la vie de Jawad se rétrécit jusqu'à n'être plus qu'un ersatz de vie.
Ce n'est pas un livre à lire pour se remonter le moral, je ne le conseillerais pas à n'importe qui n'importe quand, surtout en ce moment où beaucoup de lecteurs semblent rechercher des livres qui les sortent d'un quotidien pesant. Pourtant c'est un livre passionnant, dont la lecture secoue, happe, dont on ne sort pas indemne parce que l'on comprend mieux ce qu'est une vie gâchée par la guerre. Un livre qui ne méritait pas de dormir aussi longtemps sur mes étagères, mais dont la lecture au moment où les images de guerre sont omniprésentes dans notre quotidien prend un relief particulier. Un livre dont je vais garder le souvenir longtemps et que je recommanderai pour les lecteurs qui sont prêts à affronter de tels sujets.
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