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Critique de ElizabethBennet


En dépit de l'immense controverse (parfaitement injustifiée d'ailleurs) que cet essai a suscitée lors de sa parution, ce dernier reste néanmoins l'un des livres les plus importants jamais écrits sur l'histoire du nazisme et de la Shoah. Alternant compte-rendus du procès et chapitres relatant méthodiquement les faits historiques, déportations et exterminations, en Allemagne et dans le reste de l'Europe, sans oublier de mentionner les milliers de non-juifs également assassinés (handicapés mentaux ou moteurs, homosexuels, soldats du Reich, tziganes, bizarrement oubliés du procès...), cet essai s'avère véritablement complet, frappant et si bien documenté qu'il serait non seulement stupide, mais encore scandaleux, de l'accuser de partialité, sous prétexte qu'Hannah Arendt a été, mais bien avant la guerre, la maîtresse de Heidegger, philosophe connu pour ses accointances (pour le dire gentiment) avec le parti nazi. Car ce qui a gêné bien des gens dans cet essai n'est pas tant la "banalité" d'Eichmann que l'accusation portée contre le peuple juif, et confirmée par la suite par plusieurs historiens, d'avoir participé à sa propre extermination, par le biais des conseils juifs. Hannah Arendt montre en effet que ces derniers, parfaitement intégrés dans la machinerie allemande, n'ont pas hésité à sacrifier des millions de Juifs "de basse extraction", pour en sauver quelques milliers soigneusement choisis pour leur profession, leur renommée, leur fortune personnelle. On se serait mis à dos les milieux sionistes pour moins que ça. Mais Hannah Arendt a le courage de ses opinions, et les défend constamment, avec une dignité qui est tout à son honneur. de plus, elle n'hésite pas à remettre en question le fait que ce soit le tribunal des vainqueurs qui juge le vaincu, au mépris de toute équité, qui plus est, puisque aucun témoin n'a pu se présenter pour la défense, tandis que l'accusation a produit plus de cent témoins, dont les allégations dépassaient en outre le cadre du procès, puisqu'ils s'agissait dans l'ensemble de survivants des camps venus pour raconter l'atrocité de l'extermination plus que pour véritablement accuser Eichmann, qu'ils n'avaient pour la plupart jamais vu. On a reproché à Hannah Arendt son arrogance, son ton ironique, ses attaques directes, mais qui, à l'époque, aurait eu le courage de parler comme elle l'a fait ? Et comment l'accuser de prendre elle-même la défense d'Eichmann, alors que jamais, dans les cinq cents pages de ce livre, elle ne l'excuse de quoi que ce soit, se contentant de montrer les failles, les incohérences, les injustices du procès, et l'extraordinaire banalité de cet être qu'on a voulu diaboliser à l'excès, lui qui n'est rien d'autre qu'un gratte-papier sans imagination et sans esprit, frustré de n'avoir jamais fait carrière dans l'administration et s'exprimant par stéréotypes et formules toutes faites ?

(la suite en cliquant sur le lien ci-dessous !)
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