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Critique de louji


Je n'arrêtais pas de voir du I. Asano dans mes différents fils d'actualités et ça m'a donné envie de redécouvrir son univers. Avant Errance, je n'avais lu que Solanin, que j'ai bien apprécié (mais je vais le relire, car j'étais sûrement trop jeune pour en comprendre toutes les nuances) et qui m'a donc convaincue de mieux découvrir le mangaka. Je dois reconnaître qu'Errance est une lecture bien plus ardue, plus sombre, avec les instants de vide de Solanin, mais sans son engouement de jeunesse. Je suis ressortie à la fois pleine et vidée d'émotions. C'est une lecture assez sombre, mais assurément prenante et intrigante.

Errance est présentée comme étant en partie autobiographique, ce qui m'a laissé un goût amer, car ça laisse présager des interrogations assez violentes de la part d'I. Asano sur son métier, ses envies et sa propre personne. J'imagine qu'il est parfois difficile d'échapper à ce genre de crise existentielle, quel que soit l'âge et la situation, et ce récit a peut-être été une thérapie pour le mangaka. C'est aussi peut-être la raison pour laquelle cette oeuvre est ultra réaliste, loin du glamour, des paillettes et de la jolie facette du métier de mangaka. Néanmoins, pour ma part, je ne voyais pas cette profession sous cet angle-là avant la lecture d'Errance, j'avais déjà conscience de la rudesse, du stress et de la violence psychologique liés à ce métier… Et j'ai d'ailleurs l'impression que les langues se délient pas mal de ce côté-là, sans compter le nombre d'auteurs freelance en progression (j'ai l'impression ??).

Errance, c'est avant tout son protagoniste, Kaoru, mangaka dont la dernière oeuvre à succès vient de prendre fin. Commence alors la période douloureuse et angoissante de transition entre fin et commencement d'une oeuvre, où le syndrome de la page blanche est une véritable maladie à combattre (un thème assez récurrent ces derniers temps j'ai l'impression, non ?). Kaoru est un personnage rapidement dépeint comme assez froid et égocentré, dont la vie prenait sens par l'accomplissement professionnel. Néanmoins, cette vie est brutalement mise en pause à la fin de son manga et le cynisme, le défaitisme et l'égoïsme de Kaoru iront croissant au fil de ses pages blanches. On suit alors un homme vidé, qui se nourrit de temps à autre de l'optimisme sans limites des réseaux sociaux, tout en les haïssant et les critiquant. Qui se nourrit aussi de plaisir sexuel, profitant du fossé qui s'est creusé entre sa femme et lui, justifiant sa conduite sur l'absence de sa femme à la maison pour des raisons professionnelles (sans jamais se remettre en question, bien évidemment). Vous l'aurez compris, on ne s'attache absolument pas à Kaoru (du moins, pour moi), au contraire même. Toutefois, choisir un protagoniste de ce genre m'a semblé plus pertinent et réaliste pour dépeindre ce passage de vie douloureux et cette quête de sens. À savoir que les personnages secondaires paraissent très « vivants », voire « joyeux » à côté de la noirceur de Kaoru, alors que ces persos secondaires ne sont pas forcément plus heureux que d'autres. Les personnages féminins qui entourent beaucoup Kaoru, à savoir sa femme et son amante, sont avant tout présentés comme des corps à serrer le temps d'un échange de chaleur humaine. Loin de promouvoir une image sexiste ou réductrice, le manga donne simplement la vision qu'a Kaoru de ces femmes. Il est à la fois amoureux d'elles, sans vraiment l'être (comme pour l'univers du manga ?). Lorsqu'Errance nous donne du recul sur la femme et l'amante de Kaoru, on se rend compte bien vite à quel point leur vie est bien plus complexe derrière les instants qu'elles partagent avec Kaoru et à quel point celui-ci n'est qu'un infime attrait de leur existence. Il y a aussi le jeu de la copine de fac de Kaoru, que j'ai tout simplement adoré. Parce que cette fille a confirmé l'avis que je me faisais de Kaoru et que, puérilement, ça m'a soulagée. J'avais peur de mal comprendre Kaoru et ses questionnements, mais, en fin de compte, la chute d'Errance nous confirme à quel point le protagoniste était bouffi de noirceur, de froid et d'égocentrisme.

Pour le graphisme, c'est toujours aussi ouf, pour faire simple et clair ! C'est du régal pour les yeux, chaque planche est finement réalisée, les expressions sont travaillées, les poses, les gestes… tout est calculé. I. Asano glisse des planches doubles de paysage pour enchanter nos pupilles et vient intensifier certaines scènes par une mise en scène percutante et surprenante. Sans compter la tension et le jeu qu'il y a entre les pages du début et de la fin et que j'ai adoré (oui, je me répète !).
Lien : https://littcentcinquante.wo..
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