Chronique de la France rurale de la fin des années trente,
Gustalin a gardé toute sa fraîcheur. Il évoque des greniers saturés de poussière de soleil, des litrons de rosé dont le cul s'est glacé dans les remous d'un ruisseau, l'ombre apaisante des vergers bruissant d'insectes, le cri-cri du foin où l'on sieste ... une chanson de Mireille...
Le fil narratif y est certes lâche qui passe d'un personnage à l'autre, entrecroisant anecdotes triviales et drames humains mais qu'il est plaisant à dévider. Dans son petit bout de terre, jurassienne,
Marcel Aymé nous gringotte un refrain tantôt allègre et polisson, tantôt chagrin.
On y croise, au détour d'un couplet, de doux rêveurs : un cossard qui s'imagine garagiste, une souris des bois qui se voudrait souris des villes, un costaud chamboulé par des démangeaisons de jeunesse, une accorte Juive, prosélyte guillerette, une vieille toxico aux sucres d'orge... La tendresse révérencieuse de
Marcel Aymé pour le monde paysan est désaltérante.
Mais le plus beau des personnages, à mes yeux, reste Museau, un corniaud fasciné à la fois par sa maîtresse et par une affriolante chienne de ferme. Les attitudes, les réflexes, les regards du gentil chien sont croqués avec un réalisme désarmant. L'auteur habite littéralement le cabot et lui prête -anthropomorphisme touchant- songes et pensées.
Un roman léger et grave. Un sourire embué de larmes...
Tout l'art d'Aymé.
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