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Critique de Crossroads


Badinter – abolition de la peine de mort : un nom et un combat désormais indissociables , ancrés à jamais dans la mémoire collective .

S'il fut toujours un abolitionniste convaincu , Robert Badinter jettera véritablement toutes ses forces dans la bataille fin 72 . Buffet – perpétuité pour assassinat - et Bontems – 20 ans de réclusion pour vol qualifié - , tous deux détenus à la centrale de Clairvaux , prirent en otage une infirmiere et un gardien dans le but d'obtenir une libération anticipée . Assaut des forces de l'ordre , Buffet décide , seul , d'égorger ses deux monnaies d'échange ! Bontems , bien que reconnu innocent de ces deux homicides volontaires , suivra cependant son compagnon d'infortune sur l'échafaud le 28 Novembre 72 , Pompidou ayant alors refusé de le gracier . Début des hostilités pour Badinter qui , durant 9 ans et fort de son indéracinable volonté , s'opposera victorieusement à la grande veuve au travers de procès en appel tous gagnés , commuant ainsi la peine de mort requise en détention à perpétuité . Un engagement personnel forçant le respect et l'admiration à une époque ou le pouvoir en place supportait docilement , faisant fi de sa propre conviction , une opinion publique farouchement opposée à sa disparition !

Il aura donc fallu pres de deux siecles pour aboutir à la supplique du sieur le Peletier de Saint-Fargeau , premier requéreur en 1791 ! Deux siecles durant lesquels de grands noms se succédèrent , tous portés par une détermination et une ténacité sans failles . Lamartine , Jaurès , Briand , Hugo qui en 1848 proclamait : " L'abolition doit etre pure , simple et définitive "  . Autant d'illustres personnages qui , en leur temps , oeuvrerent inlassablement à la disparition de cette faiseuse de veuves . Un bouquin passionnant que je craignais , à tort , tres technique , et qui se lit pourtant d'une traite tant le propos et l'approche faite sont tout sauf rébarbatifs ! Badinter écrit juste , sans fioritures ni emphases , et vous convie talentueusement à devenir le spectateur privilégié d'un engagement , d'une époque . Les années 70 , Giscard est au pouvoir . Pourtant hostile à la peine capitale , il ne s'y opposera que tres rarement , préférant ceder à la vox populi plutot que de s'aliener ses potentiels électeurs à la veille d'un second mandat sollicité face à Mitterand en 81 . Ce dernier , totalement à contre-courant des sondages d'époque , affirmera son entiere et complete opposition à la peine capitale , allant meme jusqu'à promettre son abolition si d'aventure il était élu...Badinter deviendra l'avocat emblématique de procès aussi retentissants que symboliques comme le furent ceux de Christian Ranucci ( affaire du pull-over rouge ) et de Patrick Henry qui , au sortir d'une garde à vue , n'hésita pas à condamner mortellement les tueurs d'enfants . Vous avez dit cynique ? Autant d'affaires insupportables que Roger Gicquel résumera par cette phrase désormais devenue culte : "  La France a peur " . A noter que bon nombres d'opposants à la peine capitale furent également de droite , le cran d'assumer ses convictions personnelles n'étant l 'apanage d'aucun parti . Philippe Seguin monta courageusement au créneau , allant alors à l'encontre meme de sa propre famille politique . Un périple législatif mouvementé , harassant , fait de grands espoirs et assorti d'autant de tragiques désillusions jusqu'à cette date fatidique du 10 Septembre 1977 ou l'on fit monté une derniere fois un condamné sur l'échafaud . Il avait 31 ans , s'appelait Hamida Djandoubi et eut ce triste privilege...C'est le 30 Septembre 1981 , au terme d'une décénnie judiciaire incroyablement riche et agitée , que Badinter assista à l'adoption définitive de cette loi sur l'abolition tant désirée...
Un livre essentiel pouvant fortement servir d'axe de réflexion dans certains pays tels que , allez , au hasard , La Chine , l'Iran , la Corée du Nord , et tant d'autres...

L'abolition , un cours d'histoire magistral dispensé par l'un de ses acteurs incontournable ! Eeeet coupez !! Elle est bonne , on la garde...
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