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Critique de Thrinecis


Avec ce récit de voyage, notre anthropologue préféré nous emmène au Sulawesi, anciennement Célèbes. Je croyais naïvement que tout anthropologue qui se respecte avait une marotte, une idée fixe et ne rêvait que d'étudier encore et toujours le même coin sauvage et inaccessible de la planète où vivent les derniers membres d'une tribu plutôt méconnue. Eh bien, il faut croire que non, puisqu'après avoir étudié les moeurs et coutumes des Dowayos au Cameroun, Nigel Barley décide - un peu au hasard - de changer de continent et de poursuivre ses pérégrinations en Indonésie pour s'intéresser à une nouvelle ethnie, celle des Torajas, qui se niche dans les montagnes de l'île de Célèbes.

Mais le Sulawesi, c'est vraiment loin et dans les années 80, ce n'était pas si évident d'y parvenir rapidement. Après un voyage assez spartiate dans un avion d'Aeroflot en compagnie de charmantes hôtesses russes et une escale à Singapour, Nigel Barley débarque à Jakarta. Mais il lui faudra encore de nombreuses étapes et les moyens de transport les plus variés afin d'atteindre Rantepao, la capitale du pays toraja. Arrivés à ce stade, nous ses lecteurs aurons compris comme lui que le voyage en soi fait déjà partie de l'expérience. Les fréquents quiproquos de langage avec les autochtones, les difficultés et mésaventures pour progresser sur le lent chemin vers la tribu des Torajas font tout le sel de ce récit plein d'humour et d'auto-dérision.

Enfin arrivé sur place, Nigel Barley découvre des villageois extrêmement sympathiques qui révèlent une inépuisable propension à la gentillesse sans contrepartie aucune et une contagieuse aptitude aux pleurs dès qu'ils leur arrivent un malheur. Chez les Torajas on s'enlace beaucoup, on dort en s'empilant les uns sur les autres, on verse des larmes tous ensemble et on ne manque jamais d'aider ce grand blanc étranger qui se cogne partout et qui accumule les impairs ou les contresens pour leur plus grande joie.

Le récit de Nigel Barley est atypique dans le sens où sa lecture ne donne pas l'impression qu'il a collecté avec application des matériaux pour des recherches ou une thèse. Mais sous une apparente désinvolture, Nigel Barley a quand même le projet très sérieux d'étudier leurs rites funéraires ancestraux ainsi que leur art de la sculpture qui s'exprime pour décorer les tombes avec des statues ou pour orner de coqs ou de têtes de buffles leurs maisons traditionnelles aux incroyables toitures en forme de coque de bateau.

L'anthropologue ira même jusqu'à organiser une exposition à Londres, en invitant Nenek le vieux prêtre sculpteur et trois autres Torajas à construire et décorer un grenier à riz, sous les yeux des visiteurs du musée. En Angleterre, les rôles s'inversent : les Torajas cherchent à comprendre la culture des Anglais, ne cessent de questionner l'anthropologue et sont parfois choqués en découvrant certains de leurs usages comme le manque de respect des Anglais envers leurs hommes politiques, ou l'utilisation du papier toilette, summum selon eux d'un dégoûtant manque d'hygiène !

Pour Nigel Barley et ses amis Torajas, l'histoire ne s'arrête pas là, l'anthropologue partageant désormais son temps entre le Royaume-Uni et l'Indonésie dont il est tombé amoureux.

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